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Murielle Fouassier témoigne de son expérience unique à travers ce blog: un voyage autour du monde, qu'elle a entrepris depuis janvier 2008, à la rencontre de milieux et de professionnels spécialisés en criminologie.

Suite à des études de psychologie, en France et de criminologie à Montréal, au Canada, Murielle a souhaité davantage élargir son champ de connaissance, afin de tenter de mettre en avant les pratiques d'interventions originales et efficaces en terme de diminution de la récidive, auprès des jeunes contrevenants, qui sont dans une période développementale complexe et déterminante.

Dans une ère où les interventions évoluent et progressent largement, où les moyens techniques nous permettent de dépasser nos propres horizons et de traverser les frontières, où tous les peuples se penchent sur des questions psycho-sociales déterminantes pour l'avenir de nos sociétés, "Criminologie de par le monde" symbolise le projet d'ouvrir et d'enrichir le regard porté sur l'intervention en criminologie. Il servira aussi à tous les professionnels exerçant de près ou de loin auprès d'une population de jeunes contrevenants, désirant ouvrir leur champ de connaissance ainsi que leur réseau.

Comment définir la criminologie en quelques mots? C'est une science sociale et humaine qui étudie les comportements criminels et tente non seulement d'expliquer le phénomène, en axant principalement son regard sur les causes et les impacts de la délinquance, mais aussi d'apporter des solutions, notamment en terme d'intervention.


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¤ L'INTERVENTION EN CRIMINOLOGIE

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10 janv. 2007

¤ QUEBEC: Réflexion sur la place des programmes de réparation auprès des jeunes contrevenants du Centre Jeunesse de Montréal



Introduction

Dans les unités de garde du centre jeunesse de Montréal (CJM), les jeunes contrevenants évoluent, grandissent, mûrissent, « travaillent sur leur affaire », quand on leur donne tous les moyens pour pouvoir le faire, en terme de temps, de matériels, de suivis. Pourtant, « la recherche révèle que les interventions axées sur la collectivité et non privative de liberté sont plus efficaces que la mise sous garde pour favoriser la réadaptation de l'adolescent ». (Ministère de la justice, 2005) Ne pourrait-on penser que cela viendrait du fait qu’elles offrent aussi plus de perspectives positives à l'adolescent, par exemple en l'enjoignant de réparer les dommages causés à la victime ou à la collectivité?
Connus aujourd'hui sous le nom de Regroupement des organismes de justice alternative du Québec (ROJAQ), trente neuf organismes, présents dans les différentes régions administratives du Québec, travaillent en étroite collaboration avec les Centres Jeunesse du Québec (CJQ) et le Système pénal et ont pour mandat d’intervenir auprès des jeunes contrevenants et des victimes, en leur proposant un vaste éventail de mesures, et principalement des mesures de réparation. Mais ces organismes ne sont pas en lien avec les unités de garde, ou exceptionnellement. Pourtant, il semblerait que tant ces jeunes contrevenants, extrêmement carencés, que leur victime, en auraient besoin. Ainsi, pourquoi et comment favoriser l’implantation de mesures réparatrices au sein même des unités de mise sous garde, dans le Centre Jeunesse de Montréal ?

1 La justice réparatrice auprés des jeunes contrevenants

1.1 Comment définir la problématique des jeunes contrevenants rapidement?

1.1.1 Défaillances au niveau du développement psycho-affectif…

Selon les théories psychanalytiques, les bases de la construction de la personnalité s’établissent dans les premières expériences de l’enfant, soit, les premières années de sa vie. Symboliquement, l’image maternelle et paternelle ont des rôles différents à jouer au niveau de la construction psychique de l’individu.
- Carences affectives à la petite enfance :
Les besoins physiques et affectifs non comblés par le personnage central qui fait le lien avec le monde, principalement la mère, une surstimulation ou un surinvestissement de l'enfant (dans une relation duelle avec la mère), des sécurités élémentaires non respectées sont autant d’éléments qui favorisent les passages à l’acte et particulièrement la conduite délinquante, lors de l’adolescence.
En effet, ces carences du coté de l’image maternelle ont pour effet de provoquer chez l’enfant, puis de réactiver chez l’adolescent notamment un manque de confiance envers l’autre et soi, un sentiment de rejet, une insécurité affective, une faible estime de soi, un retard développemental important (cognitif, social, affectif), un attachement superficiel aux autres, une grande vulnérabilité affective. Les enfants qui auront vécu des carences affectives importantes sont donc plus sujets à la délinquance, car, au lieu d’avoir une première expérience affective et sociale positive, celle-ci sera, à l’inverse, menaçante et angoissante.

- Absence ou incohérence des figures de lois, pas de limites claires:
L’image du père doit, quant à lui, permettre d’établir des lois claires, justes, et cohérentes, pour que l’enfant soit arrêté, non seulement dans ses agirs mais aussi dans ses désirs.
L’enfant qui n’aura pas d’image paternelle n’aura donc aucune limite qui lui sera imposé. Il n’aura pas fait l’expérience de la loi sociale, ce qui ne lui permettra donc pas d’intérioriser des normes, des valeurs, des limites socialement acceptables. A l’inverse, élevé par les contraintes physiques, les punitions corporelles, les incohérences (laxisme puis violence), l’enfant intériorisera qu’une personne doit être battue pour comprendre, et qu’être le plus fort passe par la force physique. Au moment des premières identifications, celles-ci seront teintées de violence et d’agressivité. Cela devient pour lui son mode de résolution de conflits. Jamais on ne lui a montré à s’expliquer, se justifier, éclaircir des situations, demander pardon… C’était aussi le moyen utilisé pour imposer le respect. Ainsi, plus tard, au moment de se confronter au monde, à la société, l’adolescent n’aura aucun repère et n’aura pas eu l’habitude de se faire arrêter dans ses envies, ses désirs, ses pulsions. En plus de cela, s’il n’a jamais intégré des valeurs correctes (respect de l’autre, partage..), il n’aura aucun remord et pourra même faire preuve d’une certaine insensibilité. Dans le groupe de pairs, le jeune reproduira ses expériences, afin de se faire une place, d’obtenir de la valeur aux yeux des autres, de se défendre, de se faire reconnaître etc.

1.1.2 Défaillances au niveau du développement cognitif…

- Défaillance de l’intelligence opératoire formelle:
Selon Piaget, le raisonnement formel s’acquiert à l’adolescence. La pensée formelle permet au jeune d’explorer des dimensions qui lui étaient jusque-là inaccessibles tant du point de vue physique que sur le plan social. Sa réflexion liée jusque-là à des objets concrets, s’ouvre désormais à la possibilité de considérer des idées abstraites. Il apprend notamment à maîtriser les notions de probabilité, de réel et de possible. Il devient capable de réfléchir sur des choses, songer à des idées, manipuler des concepts, définir des stratégies, sans que ceux-ci ne soient immédiatement présents dans son environnement.
Les jeunes contrevenants persistants présentent généralement un écart entre le niveau verbal et non–verbal aux tests de QI. Un grand nombre n’a pas atteint le développement du stade de l’intelligence abstraite. « Très souvent, le jeune qui recourt à la violence est celui qui ne dispose guère d’autres moyens d’expression. En particulier, il ne sait trouver les mots pour traduire ce qu’il ressent. » (J.M. Petitclerc, 2002)
- Défaillance au niveau du développement de perspective interpersonnelle :
D’autres chercheurs ont tenté d’appliquer le modèle piagétien aux relations sociales. Ils ont développé des théories de la cognition sociale dont Selman, en 1980. La cognition sociale nous permet de nous mettre dans la peau de l’autre pour comprendre la dynamique de ses conduites alors que le jugement moral ajoute un jugement sur la valeur des conduites observées. Ainsi, avec l’adolescence, la compréhension sociale du jeune pourra intégrer sa propre perspective et celles des autres personnes.
La capacité de bien saisir l’entourage social, dépendant étroitement du niveau de la cognition sociale, est plus ou moins bien intégrée selon les adolescents. Au niveau des perspectives interpersonnelles, les jeunes qui n’éprouvent pas d’affect envers l’autre, ni d’empathie sont susceptibles d’agir plus facilement de manière délinquante: la victime n’aura pas de reconnaissance à leurs yeux, leur égocentrisme ne leur permet pas d’être conscient du mal produit, si bien qu’aucun sentiment de culpabilité émerge.
- Défaillances au niveau du jugement moral :
Kohlberg, cognitiviste, a contribué à tracer l’évolution de l’enfance à l’âge adulte. Ses recherches lui ont permis de dégager 3 niveaux de jugement couvrant six stades de développement. Le premier correspond à l’enfance, le second à l’adolescence, et le troisième niveau, quant à lui, à l’âge adulte. Dans ses études Kohlberg a constaté des différences interindividuelles très significatives. Tous les individus n’atteignent pas le niveau post conventionnel, correspondant à l’âge adulte, ni même le niveau conventionnel. Plusieurs stades, en effet, peuvent être discriminés chez les adolescents.
Ainsi, alors que le jugement moral devrait s’intérioriser et que l’opinion des autres deviendrait moins importante que les principes généraux auxquels adhèrent les individus, la grande majorité des adolescents en difficultés n’accède pas à ces modes de pensées. Le jugement moral est effectivement souvent déficient chez les délinquants et très précaire, si bien qu’ils ne prennent pas conscience de la gravité des actes posés.

1.1.3 Défaillances au niveau du développement social…

L’adolescence n’est pas le point de départ du processus de socialisation. Mais toutefois, l’évolution sociale change: le jeune doit assumer un rôle social, masculin ou féminin, il doit redéfinir ses rapports sociaux, tout cela, sous l’impulsion des transformations physiques et mentales. Quand on parle du développement social de l’individu, on parle de la famille, qui est le premier environnement social, ainsi que des relations avec la société plus élargie. Tout au long de la vie, il y a des modifications dans les relations. A l’adolescence, tout particulièrement, le jeune commence à se détacher de ses parents, pour aller vers le groupe de pairs, et, progressivement, vers une personne du sexe opposé. Selon Erickson, c'est donc à l‘adolescence que l‘identité personnelle va se préciser. Le jeune doit parvenir à se distinguer d’autrui tout en se posant comme unité intégrée de caractéristiques personnelles, de forces et de faiblesses. L’adolescence est donc une période de recherche, d’introspection et d’exploration à partir de laquelle surgit une identité. Elle constitue en plus un stade d’intégration des acquis antérieurs et d’expérimentation de rôles différents à la maison, à l’école ou avec les amis. Le groupe de pairs constitue un milieu favorable pour expérimenter des rôles, présenter des images différentes pour en connaître l’effet social à l’intérieur de relations interpersonnelles.
Si l’identité du jeune n’a pas été bien élaborée durant les périodes de maternage et d’identification, et que ses besoins n’ont pas été satisfaits adéquatement, si le jeune accumule des expériences négatives de socialisation, il pourra avoir, petit à petit, des sentiments de rejets, d’abandon. Comme il y a augmentation de l’influence des pairs, accompagné d’une chute marquée de l’influence des parents, si l’identité du jeune est fragile, il sera très vulnérable et sera facilement en proie à des pairs délinquants. L’appartenance au groupe entraîne beaucoup de conformité durant cette période. Mais d’autres éléments, lors des apprentissages sociaux, peuvent expliquer la délinquance. En effet, au niveau des stades de perspective interpersonnelle, il semblerait que le fait de rester dans une orientation centrifuge, sans accéder à la réciprocité soit un facteur de délinquance. N’ayant pas conscience de l’autre, le jeune reste égocentrique, accès sur lui, son plaisir. Il agit sans prendre conscience de l’autre, et même, à son détriment.

1.2 Quels sont les principaux objectifs de la justice réparatrice qui répondent aux besoins des jeunes ?

1.2.1 Conscientisation de l’autre et développement de l’empathie

Très souvent, les jeunes qui commettent des délits ne semblent prendre aucunement conscience de l’autre, et de leur victime, en particulier. Lorsque nous les interrogeons sur les conséquences de leur acte, en garde ouverte, dans mon unité de stage, rare sont ceux qui évoquent les tords causés à un individu! Ils donnent l’impression de ne se sentir nullement concernés par les autres et vont même jusqu’à dire que « c’est leur problème, ce qui leur est arrivé! » Non, spontanément, les conséquences qu’ils voient les concernent : « La conséquence, c’est que je me retrouve là, en dedans. » « C’est que mes parents vont plus me faire confiance. »
Un grand nombre n’exprime ni remord ni regret, ni compassion, ni pitié à l’égard des victimes. Bien que nous sachions que cela est avant tout une carapace protectrice pour ne pas se sentir vulnérable à l’autre, il n’en est pas moins nécessaire de solliciter chez eux des sentiments qui leur sont difficiles d’éprouver sans se mettre en danger. Cela ne peut se faire tant que l’adolescent se protège et se défend de l’émotion. « Celui qu’écrasent la haine, la honte et le ressentiment, le rejet et l’humiliation ne peut développer seul des projets créatifs et réparateurs et s’en trouver réconforté. Il a besoin qu’on lui montre le chemin » (M. Vaillant, 1999). Il a besoin de se sentir reconnu, de sentir qu’il peut avoir confiance, et c’est là que petit à petit, le processus de réparation pourra être envisagé et pourra devenir enrichissant pour lui et apaisant pour la victime. En effet, « la réparation amène les jeunes mis en cause à reconnaître ce qu’ils ont fait subir à autrui. » (M. Vaillant, 1999) La démarche de réparation consiste à reconnaître la victime dans sa globalité, sa place, ses paroles et ses droits.

1.2.2 Conscientisation des conséquences et développement de l’anticipation

La Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents (LSJPA) qui vise à inculquer aux jeunes des valeurs de respect et de responsabilisation, impose des sanctions qui « doivent être proportionnelles au mal causé par le délit. » (L. Walgrave, 1993). Mais dans ce processus judiciaire, où on se demande si ce n'est pas la force et la coercition qui sont mises en avant, le jeune, qui a déjà la plupart du temps des erreurs de pensées, n’a pas son mot à dire, et doit exécuter la sanction, qu’il le veuille ou non, qu’il en comprenne le sens ou non. Ainsi, pour la majorité des jeunes, le fait d’être mis face à la Loi et à ses règles a finalement une signification toute autre et l’effet inverse de ce qui est recherchée, puisqu’elle provoque bien souvent chez lui des sentiments d’injustice, d’aliénation et de rejet des valeurs sociales.
Or, pour qu’il s’insère dans la société, il est nécessaire que le jeune réponde de ses actes et comprenne l’impact de ceux-ci sur le monde qui l’entoure. Mais cela nous exige de comprendre et de composer avec les défaillances du jeune, de façon à trouver des moyens appropriés qui auront des effets dans le long terme. « Par le dialogue instauré entre les parties au conflit, par la recherche commune de solution, la justice que la médiation pénale peut promouvoir est naturellement moins violente, nettement moins traumatisante et surtout clairement participative. » (R. Cario, 2001) En effet, l'idée de justice réparatrice encourage une nouvelle approche face au crime et au conflit : « Dans le paradigme de justice réparatrice, la restauration des torts et des pertes causées est à l’avant-plan. (…) L’obligation de réparation entraîne une confrontation et (…) un engagement personnel de la part du délinquant » (L. Walgrave, 1993). « L’intervention réparatrice de la justice tend à faire réparer les dégâts matériels, ou compenser les tords physiques et/ou psychologiques » (L. Walgrave, 1993), de manière à réguler les conflits de façon plus humaine pour la victime et le délinquant. La « réparation » du tord étant recherchée, une attention toute particulière est mise sur les conséquences des actes, durant le processus réparateur. Les services de dialogue, en justice réparatrice tel que la médiation, les cercles de guérison etc. permettent de rendre le jeune acteur de sa démarche, de rétablir une communication, de renouer un dialogue, d’échanger entre les deux parties, de donner au jeune une occasion de s’exprimer sur ses actes et d’avoir accès au ressenti de l’autre.

1.2.3 Responsabilisation du jeune et réparation de ses actes

Pour un adolescent, il est essentiel que soit nommé et posé la loi. La rencontre avec la justice inaugure un rapport à la loi qui n’a, bien souvent, pas pu se faire dans la famille. Elle vient alors rappeler au jeune l’existence d’interdits, qui n’a pas pu être intégré jusque là et lui permettre d’appréhender autre chose que la Loi de la rue en découvrant les règles dans lesquelles il s’insère. La mission éducative est de lui permettre de réaménager son rapport à la réalité, de lui faire prendre conscience que son acte n’est pas juste un acte anodin et personnel, mais qu’il constitue un délit et s’inscrit dans le registre des codes et des lois sociales. Il est important que lui soit expliquée la fonction humanisante des codes, la nécessité d’établir des règles et le respect des libertés fondamentales et des droits individuels. Tout cela peut l’aider de sortir de son monde imaginaire de vengeance et de persécution. La réparation, dans ce cadre, peut être vue comme une possibilité de lui faire comprendre plus adéquatement en quoi et pourquoi son acte est vu comme une transgression. En le conscientisant à sa place d’acteur et aux conséquences que son comportement a provoquées autour de lui, celui-ci est plus apte à comprendre le sens des lois et « à examiner sa propre responsabilité » (M. Vaillant, 1999). Selon Winnicott, l’adolescence est une période de transition où le jeune a besoin de se reconnaître, dans ses actes, « d’être acteur dans le déroulement de son existence pour en dire quelque chose » (Winnicott, 1969) : Tu as enfreint la Loi, tu as dépassé la limite de tes droits en causant du tord, tu dois à présent te positionner comme acteur de cet acte et trouver des solutions pour réparer. Il est indispensable que le jeune reconnaisse être responsable des gestes qu’il a posés. La justice restaurative « responsabilise l’infracteur qui prend connaissance des répercussions réelles de l’acte commis. » (Cario, 2001)
Selon la Commission du droit au Canada, « le redressement des personnes délinquantes par la prise de responsabilité active » est l’un des objectifs direct de la justice réparatrice. (Commission du droit du Canada, 2003) En effet, « que ce soit au moyen de la médiation entre la victime et le délinquant ou de processus de groupe comme les cercles, les communautés communautaires ou les conférences de groupe, la justice réparatrice vise d’abord avant tout à inciter les délinquants à assumer la responsabilité de leurs gestes. » Les cercles, les conférences de groupe donnent aux différents membres de la Communauté la possibilité de permettre et d’inciter les délinquants à se reconnaître comme responsables de leurs gestes, et de leurs conséquences. Directement mis face aux tords causés par ses actes, devant un groupe garant des normes sociales, le jeune ne peut se cacher, mais doit répondre de ceux-ci. Il ne peut donc pas éviter d’être confrontés aux conséquences humaines de ses actes, comme il peut le faire dans le système de justice pénale accusatoire, où la question de la responsabilité n’est pas clairement définie et où la seule attribution de la responsabilité équivaut à l’accusation : tu es coupable.

1.2.4 Valorisation du jeune et réintégration du jeune par des moyens pro-sociaux

Comme nous l’avons évoqué dans la première partie de ce travail, ce sont bien souvent à des jeunes fragiles et avec une estime d’eux même extrêmement précaire dont nous avons à faire, malgré leur apparence trompeuse de caïds, puissants et intimidants. En garde ouverte, il est percutant de voir comme les jeunes de gang qui semblent si sur d’eux, devant les autres jeunes, ont finalement un besoin de reconnaissance tel qu’ils agissent de manière délinquante dans le but d’affirmer leur image, de se faire accepter, et donc aimer. Admettre l’intervention, c’est perdre du pouvoir, c’est risquer de montrer ses faiblesses, c’est finalement extrêmement menaçant pour certain! En ce sens, les jeunes qui paraissent les plus rebelles sont dans la grande majorité des cas les jeunes les plus en souffrance interne. Ils se sont souvent senti dévalorisé tout au long de leur parcours de vie, à la maison, à l’école, etc. Ils ont souvent accumulés les échecs et se sont, petit à petit, détaché des normes sociales, celles-ci devenant peu à peu source de dévalorisation personnelle et sociale. C’est là que la réparation a un effet tout à fait différent qu’une mesure punitive ou réhabilitative. En effet, pour pas que cela ne soit destructeur pour son développement identitaire, le jeune doit aussi pouvoir se reconnaître dans « des actes, créateurs, imaginatifs, utiles », et pas simplement dans ceux qui sont inacceptables (M. Vaillant, 1999). Ainsi, le jeune ne se sent pas accabler par une profonde culpabilité et peut retrouver une certaine dignité et estime de lui. Ainsi, « la réparation psychique même éducative et judiciaire, si elle s’engage sur les chemins de la créativité, si elle passe par l’espace transitionnel, peut dégager suffisamment d’espace psychique pour permettre un véritable apaisement personnel. Elle a le pouvoir singulier de transcender la violence interne et de calmer la souffrance causée par les injustices et les cruautés de la vie. » (M. Vaillant, 1999) Elle pourra finalement participer au processus de réconciliation du jeune face à la société. Elle lui permet de prendre une place, avec des droits et des devoirs. La mesure de réparation peut donc l’amener à rencontrer quelque chose de lui-même qui l’inscrit dans un autre champ, quant à lui positif, créateur et responsabilisant. Il peut alors se reconnaître plus facilement dans les actes destructeurs qu’il a commis, au regard de la société. La réparation lui offre la possibilité de se sentir fier tout en répondant de ses actes en les assumant avec dignité.

1.3 Quels Modèles de justice réparatrice sont utilisés auprés des jeunes contrevenants

1.3.1 La médiation

La médiation entre la victime et le délinquant (…) est l’un des « premiers processus modernes de justice réparatrice à avoir vu le jour. » (Commission du droit du Canada, 2003) Le processus de médiation directe consiste à réunir le délinquant, et la victime, tout deux consentants, avec un médiateur professionnel ou bénévole, avant ou après le prononcé de la peine, au moment qui parait adéquat pour les deux parties.
Au trajet jeunesse, qui est un organisme communautaire de l’organisation de justice alternative de Montréal, la médiation est mise en avant. C’est une démarche volontaire, qui requiert l’accort et la participation de toutes les parties. Selon un coordinateur et intervenant au Trajet Jeunesse, la médiation est extrêmement bénéfique et serait, selon son expérience, la méthode la plus adaptée, puisqu’elle confronte directement le délinquant à sa victime, le met face aux tords causés et l’amène à réfléchir sur la meilleure façon de régler l’événement. En effet, à ce sujet, Trajet Jeunesse a répertorié un taux de réussite passant de 90 à 91%. « Lorsqu’on a recours à la médiation, le succès à court terme ne fait aucun doute : la plupart des victimes et des délinquants sont satisfaits du processus et des résultats, on parvient à une entente dans presque tous les cas et la grande majorité des plans de réparation sont respectés par les délinquants. Cette affirmation s’applique aux premières études réalisées comme aux plus récentes » (L. Kurki, 2003). Un autre professionnel, membre du Programme Impact, est également d’avis que la médiation directe est de loin la meilleure mesure réparatrice. « Il faut toujours essayer de mettre en lien le jeune avec son délit » et c’est par la médiation directe que la connexion se fait la mieux. » Là aussi, autant que possible, c’est la mesure que tous les membres de son équipe mettent en avant.
La médiation permet souvent de rendre le délinquant plus conscient de la dimension de la victime, mais cependant, malgré les nombreux avantages de la médiation directe, elle est bien évidement la mesure la plus difficile à réaliser, et dans les faits, elle est très peu utilisée, puisque selon les statistiques, le taux de la médiation représente juste entre 10 et 15% de toutes les sanctions qui sont confiées. (Commission du droit du Canada, 2003) Un certain nombre de critères sont à prendre en compte et il faut être extrêmement prudent pour ne pas transformer un moment de « réparation » en instant de revictimisation, c’est pourquoi on doit s’assurer du niveau d’engagement, de motivation et de cheminement du délinquant. De plus, n’oublions pas qu’il y a de nombreuses victimes qui ne souhaitent pas être face à leur criminel et qui refuse ce type de réparation.

1.3.2 Les groupes consultatifs

Dans plusieurs régions du Canada, on fait appel de plus en plus souvent à des groupes consultatifs afin de faciliter la prise de décision touchant les adolescents aux prises avec le système de justice pénale. Il s’agit de divers groupes de personnes qui ont pour mandat de faire des recommandations sur les moyens à prendre compte tenu des circonstances et des besoins d’un adolescent aux prises avec le système de justice. Il peut s’agir notamment d’une conférence familiale, d’un comité de justice pour la jeunesse, d’un groupe de responsabilité communautaire, d’un cercle de détermination de la peine ou d’une conférence de cas réunissant divers services.
Tous ces groupes, bien qu’ils aient chacun leur spécificité, permettent de mieux comprendre la situation en cause, de trouver des solutions nouvelles et de favoriser la participation de la victime et des membres de la collectivité au système de justice pour les jeunes. C’est en cela que ces groupes sont vu comme un mécanisme réparateur qui insiste sur l’élaboration de propositions afin de réparer le dommage causé à la victime.

1.3.3 Les travaux bénévoles

Selon les professionnels des OJA rencontrés, les travaux bénévoles regroupent la très grande majorité des mesures réalisées par les jeunes en justice alternative, à Montréal et il en est de même pour le Québec, puisqu’ils seraient de quasiment 60% au trajet jeunesse, et qu’il en est de même à Programme Impact. (Journal du Trajet Jeunesse, 2005).
On parle de réparation symbolique (ou indirecte) dans la mesure ou le travail ne bénéficie pas directement à la personne qui a été victime, mais à la collectivité proche du condamné. Les Organismes de Justice Alternative sont en lien avec plus de trois cents partenaires et proposent des champs d’activité extrêmement variés, afin de répondre au mieux aux besoins des jeunes. Ces mesures, en effet, doivent aussi répondre aux objectifs de la justice réparatrice, et plus particulièrement « l’utilisation d’ententes ou de solutions réparatrices constructives adaptées au contexte et tournées vers l’avenir ». Dans cet esprit, les équipes de justice alternative tentent au maximum de trouver la ressource la plus en lien avec le délit du jeune contrevenant et la plus appropriée en fonction de ses besoins, de ses qualités et ses motivations. « Il faut que cela lui fasse sens, et que, tant que possible, cela soit également réparateur pour lui. Une ressource et des taches bien adaptées peuvent donc avoir elles aussi des impactes très forts pour le jeune ».

1.4 Dans quel cadre les programmes de justice réparatrice sont-ils utilisés?

Au fil des années, les Organismes de Justice Alternative ont cherché à développer un modèle d’intervention visant à permettre à des jeunes ayant commis un geste répréhensible de ne pas avoir à se présenter devant le tribunal ou, le cas échéant, de pouvoir s’amender sous la supervision d’une tierce personne de sa communauté. Ce sont ces organismes qui sont chargés de mettre en place et faire exécuter les programmes réparateurs, autour des jeunes contrevenants. Le renvoi à la médiation, aux groupes consultatifs, aux travaux communautaires a lieu à l’une des quatre étapes du traitement d’une affaire criminelle: au moment de l’intervention de la police (avant l’inculpation), de la Couronne (après l’inculpation mais avant le procès), du tribunal (à l’étape de la détermination de la peine) et des services correctionnels (après l’incarcération et avant la libération). (Commission du droit du Canada, 2003) Quelque soit l’étape de la mesure, elle est donc en étroite collaboration avec le système judiciaire.

1.4.1 Les Mesures discrétionnaires appliquées par les policiers

Pour une infraction mineure sans violence, à la suite d’une enquête, le policier peut lui-même choisir de cesser les procédures et fermer le dossier, donner un avertissement au jeune, ou bien renvoyer à un organisme communautaire. Dans le cas de renvoie à un organisme, l’objectif visé est d’aider le contrevenant à ne pas récidiver. Le jeune doit accepter de participer aux activités proposées par l’organisme, qui correspond généralement à une mesure réparatrice, telle qu’une lettre d’excuse à la victime, une rencontre avec elle, un remboursement financier etc. Toutefois, ce n’est pas dans ce cadre que les mesures réparatrices sont les plus courantes, puisqu’elles ne regroupent qu’un peu plus d’un cas sur dix.

1.4.2 Les Mesures Extra-judiciaires

Un examen préalable à l'inculpation constitue la dernière occasion pour un adolescent, avant que des accusations ne soient portées contre lui, de voir son cas déjudiciarisé. Un délégué de la jeunesse évalue alors l’admissibilité de l’adolescent à une sanction extrajudiciaire, en rencontrant notamment, le jeune, ses parents, la victime et d’autres adultes de l’entourage. Il évalue alors plus particulièrement les délits commis et les réactions de l’adolescent face à ceux-ci, le milieu familial, la motivation du jeune à réparer, les difficultés d’adaptation sociale du jeune, son développement et ses capacités cognitives et les attentes de la victime.
C’est à ce moment de la procédure que celui-ci peut décider de recourir à une sanction extrajudiciaire. Ces mesures extrajudiciaires sont particulièrement indiquées pour répondre en temps utile et de façon efficace aux infractions moins graves commises par les adolescents. « Ces mesures entraînent des perspectives positives. Elles permettent d'intervenir très tôt auprès des adolescents et offrent à la collectivité en général l'occasion de jouer un rôle de taille dans l'élaboration de stratégies communautaires qui s'attaquent à la délinquance juvénile." Ce processus est extrêmement utile pour réduire le nombre d'accusations portées contre des adolescents et ayant pour effet de les amener devant les tribunaux : Dans les organismes de justice alternative, en 2005, elles comptabilisent plus d’un cas sur deux, soit exactement 5680 cas, sur un total de 10884.
L’une des conditions est que le jeune ait reconnu sa responsabilité dans l’infraction commise. Le délégué jeunesse doit alors expliquer au jeune les modalités de la mesure et lui signifier l’importance de l’engagement. La nature des sanctions extra-judiciaires est souvent elle aussi réparatrice. Il peut donc s’agir là encore de faire du travail bénévole, remettre des objets à la victime, rédiger une lettre d’excuses, etc.

1.4.3 Les Mesures Judiciaires

Lorsque l’examen préalable à l’inculpation démontre que « les mesures extrajudiciaires, informelles, ont été jugées inappropriées pour traiter le cas d'un adolescent accusé d'une infraction, un fonctionnaire décide qu'il y aurait lieu de porter des accusations contre l'adolescent. » (Ministère de la justice, 2005) Le dossier est donc judiciarisé. Si le jeune est reconnu coupable, le tribunal déterminera alors une peine, « en fonction du but et des principes de la détermination de la peine » (Ministère de la justice, 2005), puis la prononcera, en y consignant les motifs.
Cela peut être une ordonnance de probation, de mise sous garde, de surveillance ou une ordonnance spécifique, tel des travaux bénévoles, des programmes d’habiletés etc. C’est dans cette dernière catégorie que les organismes de justice alternative du Québec, tel que Trajet Jeunesse ou Programme Impact font une grande partie de leur travail, puisqu’elles regroupent, en 2005, environ un cas sur trois. (ROJAQ, 2005)

2 La justice réparatrice dans les centres jeunesses, en mesure de placement et de surveillance

2.1 Pourquoi développer des programmes réparateurs dans les Centres Jeunesses, en mise sous garde?

2.1.1 Réponse au mandat de la LSJPA

Le préambule même de la Loi sur le Système de Justice Pour Adolescent stipule que :

« - la société canadienne doit avoir un système de justice pénale pour les adolescents qui impose le respect, tient compte des intérêts des victimes, favorise la responsabilité par la prise de mesures offrant des perspectives positives, ainsi que la réadaptation et la réinsertion sociale, limite la prise des mesures les plus sévères aux crimes les plus graves et diminue le recours à l'incarcération des adolescents non violents


- les mesures prises à l'égard des jeunes, en plus de respecter le principe de la responsabilité juste et proportionnelle, doivent viser à renforcer leur respect pour les valeurs de la société, favoriser la réparation des dommages causés, avoir un sens pour le jeune, prendre en compte tant les différences ethniques, culturelles, linguistiques et entre les sexes que les besoins propres aux jeunes autochtones et à d'autres groupes particuliers de jeunes (Ministère de la justice, 2005).


Ainsi, elle vise avant tout à « faire en sorte que les réponses que l’on apporte à la criminalité juvénile soient axées sur la réadaptation. » (La Commission du droit du Canada, 2003), à apporter des réponses aux besoins des jeunes, des victimes, et de la Communauté, en tentant de favoriser des liens étroits entre ces différentes parties.
Ainsi, les valeurs réparatrices sont prônées dans la nouvelle loi. C’est pourquoi, elle favorise largement l’utilisation des sanctions extra judiciaires (ou de rechange), tout particulièrement à visée réparatrice et réhabilitative, dans un souci principal de dégorger les tribunaux. Des études ont pu mettre en avant la pertinence de ces mesures, qui encouragent à y avoir recours plus encore.
Mais, lors des sanctions judicaires, les objectifs de la LSJPA restent les mêmes, qu’il s’agisse de mesures de placement et de surveillance comme des mesures de rechange à la mise sous garde : « Toutes les peines de détention sous garde doivent viser la réinsertion sociale et les mesures qui permettront à l'adolescent de ne pas récidiver. » (Ministère de la justice, 2005) Effectivement, pour faciliter cela, toutes les peines de placement sous garde d'un adolescent prévoient une période de surveillance au sein de la collectivité, du tiers de la durée du placement.

2.1.2 Réponse au mandat des Centres Jeunesses

Le Centre Jeunesse de Montréal a différents cadres légaux. Il comptabilisait, selon les dernières statistiques de mars 2005, 17% des jeunes. (Centre Jeunesse de Montréal, 2006) En ce qui concerne les mises sous garde, en 2003-2004, il y a avait, en moyenne, 1 340 jeunes personnes en détention après condamnation au Canada. Ce chiffre comprenait 720 jeunes sous garde en milieu fermé et 620 sous garde en milieu ouvert. Cela correspond pour le Québec à 213 jeunes, au total.
Le mandat des intervenants est d’amener les jeunes qui commettent des délits à mettre fin à leurs actes délinquants et à prendre leurs responsabilités face à la société. Cela repose particulièrement sur trois points :


- Travailler sur les besoins et les défaillances du jeune, qui sont à la base des comportements délictueux, afin d’y répondre de manière pro-sociale à travers de nouveaux intérêts et implications (école, travail, sport…), des auto-analyses des cognitions qui sont en jeux dans les situations non pro-sociales, un suivi quotidien du jeune dans son vécu journalier,


- Favoriser la poursuite des tâches développementales du jeune, tant sur le plan cognitif, psycho-affectif que social, à travers l’individualisation de l’intervention pour cibler la problématique singulière du jeune contrevenant, l’utilisation de la vie en groupe comme une mini société pour permettre au jeune d’appréhender de façon pro sociale les relations interpersonnelles et les codes de vie, la généralisation des habiletés sociales individualisées dans la vie quotidienne du jeune, la valorisation du jeune en renforçant ses comportements pro sociaux, en mettant en avant ses idées pro sociales pour mieux renforcer les autres, la responsabilisation et l’autonomisation du jeune,


- Encourager tous les acteurs sociaux à participer activement à la réhabilitation du jeune, notamment en favorisant la réinsertion progressive du jeune dans la communauté, en rendant les parents acteurs de la démarche éducative et en travaillant en réseaux et avec de multiples partenaires (école, formation, club de sport…). Afin de maximiser l’intervention et d’ouvrir la communauté à participer activement au projet des centres jeunesse, les ressources du milieu, les établissements du réseau de la santé et des services sociaux et les organismes communautaires sont en effet sollicités au maximum.

De plus, dans certaines régions, dont Québec, et particulièrement Montréal, les centres jeunesses fournissent des services de médiation aux couples avec enfants qui vivent une situation de rupture familiale. Au CJM, le service de médiation a comptabilisé 721 adultes en 2005 (Centre jeunesse de Montréal, 2006). Ces méthodes sont donc déjà actualisées et reconnues dans un certain domaine, et font partie intégrante des services du Centre Jeunesse de Montréal. Ainsi, bien qu’on ne puisse pas parler de « justice réparatrice » ou de « mesures réparatrices », le mandat est toutefois intimement lié aux principes de la réparation, soit favoriser la réinsertion sociale des jeunes, répondre à leur besoin en les aidant à développer des habiletés (conscience de l’autre, des conséquences, contrôle des émotions et des pulsions etc. ) par des moyens appropriés, rendre la Communauté actrice et participative et favoriser le dialogue des différentes parties d’un conflit. Rappelons que la réparation repose sur « leur capacité à percevoir le tord causé à l’autre, d’imaginer sa détresse, de se représenter le préjudice matériel ou psychique qu’il a subi. » (M. Vaillant, 1999). Ces éléments ne sont-ils pas justement ceux qui sont ciblés en mise sous garde, tout particulièrement ?

2.1.3 Réponse aux besoins des jeunes contrevenants

Les jeunes de nos institutions ont bien souvent des carences, tant sur le plan affectif, social que cognitif. Contrairement aux délinquants occasionnels, qui sont en très grande majorité les « clients » des mesures réparatrices au Québec, les délinquants persistants ne sont pas ceux qui bénéficient de ces mesures réparatrices, tout particulièrement la médiation. « Rares sont les cas avec des actes de " violence grave " ; il s'agit le plus souvent d'événements somme toute assez bénins (ex. : menaces, graffitis, petits larcins, etc.). En fait, tout se passe comme si l'intervenant chargé d'évaluer le dossier ne pouvait envisager une rencontre de médiation que pour les délits mineurs. » (S. Charbonneau et D. Béliveau, 1999) Et pourtant, les adolescents persistants ne sont ils pas ceux dont nous devrions davantage nous soucier étant donné qu'ils sont non seulement ceux qui commettent à eux seuls plus de la moitié de tous les actes délinquants, mais également les plus carrencés d'un point de vue social, psycho-affectif et cognitif? Ainsi, plus que n’importe quel délinquant, celui qui est en placement a besoin d’une attention toute particulière.
Depuis 1990 environ, chercheurs et intervenants du Centre Jeunesse de Montréal collaborent étroitement afin de trouver des moyens efficaces pour répondre aux besoins des jeunes contrevenants et c’est dans ce contexte que sont nés les programmes d’intervention cognitivo-comportementaux. Actuellement, le but des intervenants dans les mises sous garde, comme à l’externe, est de « supprimer les excès antisociaux et de combler les déficits prosociaux » (Le Blanc et al., 2002) des adolescents délinquants qui leur sont confiés. C’est à travers notamment des outils individualisés et des activités d’apprentissage en groupe que les professionnels tendent à répondre à cet objectif. « Les ateliers d’apprentissage ont pour objet d’améliorer les habiletés relationnelles et la maîtrise des émotions qui sont déficitaires chez les adolescents en difficulté. » (Le Blanc et al., 2002) Des notions fondamentales telles que l’empathie y sont abordées et travaillées. L’organisation des programmes est finement orientée pour que le jeune parvienne peu à peu à intégrer et mettre « en application les habiletés sociales traitées au cours des séances », l’objectif étant qu’il puisse maintenir à long terme ses acquis et les généralise à son retour dans la Communauté, autrement dit, pour qu’il ne récidive pas.
En effet, à leur arrivée, il est frappant de constater comment les jeunes contrevenants que nous recevons se protègent et refoulent leur sensibilité, leur mal de vivre, leur culpabilité. Lorsqu’ils nous racontent leurs histoires, ils nous énoncent froidement la mort de certains de leurs amis devant leurs yeux, leurs expériences d’initiations dans les gangs, extrêmement violentes envers des innocents, leurs antécédents judiciaires, remplis d’agressivité et de haine, la situation sociale désastreuse de leur famille, la vision noire et fataliste de leur avenir, etc. Leurs perceptions sont remplies d’erreurs de pensées : « Il fait ça pour me faire chier », « Vous êtes injustes et vous faites exprès parce que vous m’aimez pas » : C’est effarant de se rendre compte comme ils interprètent tous les gestes de l’autre comme de l’agressivité dirigée volontairement contre eux . Rare sont ceux qui empathiques et allocentriques.
Il est toutefois marquant et encourageant de constater chez une grande proportion des jeunes l’évolution de leur rapport à autrui, au fur et à mesure du suivi, qui les aident à développer notamment certaines sphères relationnelles jamais explorées auparavant. Mais alors, pourquoi ne pas leur permettre de mettre à profit leurs apprentissages pour « réparer » leurs actes ? S’ils sont à présent outillés pour avoir accès à la conscience de l’autre, à sa souffrance, à leur responsabilité, ne serait-ce pas le moment propice pour les engager dans un processus de réparation, et ces jeunes, qui sont les plus fragiles au niveau de leur identité, ceux qui, à l’origine, sont les moins empathiques et qui commettent une grande proportion des délits graves, ne sont-ils pas, justement, ceux qui devraient être ciblé dans ces programmes de réparation, lorsqu’ils apprennent à ouvrir leur monde interne à l’autre?
Une rencontre de médiation pourrait être le moyen adéquat pour leur permettre de renouer des liens avec la société et pour leur enlever un certain poids quant à leur culpabilité, extrêmement présentes, au niveau de leur inconscient. La rencontre avec la victime bouscule souvent le jeune, qui ne peut que personnaliser et humaniser sa victime : Elle a des sentiments, des peurs, de la colère, elle n’est pas juste l’objet qui m’a permis d’assouvir mes plaisirs, elle n’a pas vécu les choses comme moi, mes comportements l’ont fait souffrir et ont eu des conséquences sur elle. Ainsi, un processus de médiation pourrait être parfaitement cohérent et complémentaire avec la finalité des programmes proposés en mise sous garde, à la lueur de la problématique initiale et du cheminement de ces jeunes dans nos services. Bien sur, chaque jeune se développe différemment et sur un rythme qui lui est propre, c’est pourquoi certains seront prêts à vivre cette expérience alors que d’autres n’auront pas atteints la maturité nécessaire. Ce n’est pas pour autant que pour ces jeunes, la réparation est inutile et qu’il faut en abandonner l’idée et les principes. En effet, l'objectif initial des travaux bénévoles est d'offrir à certains jeunes, pour qui la médiation directe avec la victime est impossible, la possibilité de réaliser des travaux au sein d'un organisme d'accueil. Car en faisant des travaux au bénéfice de la collectivité, ces derniers peuvent réparer le préjudice subi par la société.

2.1.4 Réponse aux besoins des victimes

Des études montrent les motivations réelles des victimes : Comme nous pouvons le supposer, ce serait avant tout dans le but d’obtenir réparation que les victimes participeraient à ces programmes, ainsi que pour les confronter aux conséquences de leurs crimes et a leur poser des questions sur les raisons qui ont motivé l’acte criminel. Mais, chose qui peut paraître plus étonnant, ce serait aussi dans un souci d’aider le délinquant que certaines victimes s‘insèreraient dans ces programmes. Dans les cas inverses, ce serait parce qu’elles n’y croient pas, parce qu’elles ont peur du délinquant, qu’elles sont trop en colère contre lui, ou parce qu’elles doutent de leur sincérité que certaines victimes refusent de participer à ces programmes. En effet, chose normale, suite à un traumatisme vécu, il est difficile de contrôler ses affects et de l’accepter sereinement. Une période de deuil est souvent nécessaire pour passer du choc à la colère, de la colère à la dépression, de la dépression à l’acceptation. Mais alors, ne serait-il pas possible de mettre en lien les victimes qui ne veulent pas participer, avec le processus de deuil inachevé? Le fait de ne pas y croire, d’être en colère, d’avoir peur pourrait être vu comme partie intégrante des étapes du processus de deuil. En effet, bien souvent, le temps a un pouvoir guérisseur, apaisant, et il ne faut pas oublier que dans la plupart des cas, les victimes n’acceptent pas de se trouver face à son agresseur rapidement, il leur faut cheminer, chacune à son rythme, et cela peut parfois être très long. Il faut nécessairement avoir dépasser le choc, la colère, la dépression pour avoir la force et le courage d’affronter son agresseur.
Selon une méta-analyse de Latimer, « l’ajout de programmes de justice réparatrice a amélioré la satisfaction de la victime à l’égard d’un processus qui était, de par sa nature même, assez insatisfaisant. » (J. Latimer, 2001) Ainsi, bien qu’il soit difficile de rendre compte des effets exacts de la justice réparatrice au niveau des victimes, nous savons que les victimes qui participent à des modèles de justice réparatrice sont généralement satisfaites de l’expérience vécue et « ont tiré des avantages du processus, surtout des rencontres avec le délinquant. » (Commission du droit du Canada, 2003). On voit souvent que, suite aux traumatismes vécus par les victimes, celles-ci trouvent très utiles de rencontrer le délinquant, notamment pour le certain pouvoir apaisant que cela leur procure, suite à cela. Ainsi, « les processus de justice réparatrice peuvent répondre aux besoins des victimes au lendemain d’un acte criminel », ceux-ci permettant de faciliter la guérison des victimes et de clore leur expérience de victimisation.
Alors, pourquoi ne proposer réparation qu’aux victimes de délits mineurs, si les bienfaits sont reconnus? N’est-ce pas bafouer le droit des victimes que de les négliger ainsi ? Même si le traumatisme est subjectif, nous pouvons toutefois avancer que celles-ci ont toutes les chances d’être fortement atteintes, de quelque manière que ce soit. Si les jeunes contrevenants sont en mesures de placement et de surveillance, cela signifie que toutes les autres options de peine ont été envisagées, et que les mesures de rechange à la mise sous garde (ou une combinaison de mesures), qui aurait pu faire répondre l'adolescent de son acte, ont toutes été examinées. (Ministère de la Justice, 2005). Or, il n’est pas pris en considération l’évolution du jeune lors de sa mesure de mise sous garde. Et celui qui aura acquis de nouvelles habiletés et sera près à rencontrer la victime pour accueillir sa parole, lui faire ses excuses, reconnaître devant elle sa responsabilité ne devrait-il pas le faire, si elle aussi est prête à le rencontrer? N’est-ce pas le droit de la victime, et le devoir du jeune?

2.2 Mise en place actuelle des mesures réparatrices dans les milieux de gardes pour jeunes contrevenants

2.2.1 Les « mesures réparatrices officielles »

La LSJPA propose une participation active de la victime. Pourtant, tant les délégués à la jeunesse que les intervenants ont de la difficulté à intégrer la victime au sein même du processus, sans l’utiliser. Certes, il manque de temps et de ressources, mais de façon générale, on s'occupe plus du jeune, de ses intérêts que de ceux de la victime. Il est vrai qu’il est terriblement difficile de donner un soutien à la victime, de prendre partie pour elle et de l’intégrer à un mandat, qui est orienté vers le jeune. Les obstacles sont importants : Il n’ont pas l’objectivité nécessaire, pas la formation pour s’adresser aux victimes, pas le support institutionnel, le temps et les ressources suffisants. Lorsque des pratiques réparatrices sont mises en place dans les unités de garde du Centre Jeunesse de Montréal, « ce sont des initiatives isolées », qui émergent des convictions individuelles des intervenants.
Des recherches permettent de constater que cette réalité est généralisable dans un grand nombre de pays, particulièrement l’Ecosse et la Grande Bretagne, où les chercheurs en arrivent aux mêmes conclusions : « However, in general, it was found that there is little restorative justice intervention of any kind taking place in the juvenile secure estate. Some projects that had previously flourished were dealing with only a small number of cases, and many had disappeared. » (The Youth Justice Board, 2005) Les programmes réparateurs ne sont pas donc pas utilisés par les établissements, et, s’ils le sont, ce sont par quelques rares intervenants motivés qui ont pris l’initiative d’engager leur jeune dans un processus de médiation.

Les travaux bénévoles, quant à eux, sont actuellement la forme de réparation proprement dite la plus fréquente, en centre jeunesse, puisqu’un certain nombre de nos jeunes ont pu accumulés durant leur cheminement criminel des mesures de probation, avec obligation de réaliser des travaux communautaires. Mais là encore, il est difficile pour les intervenants de réaliser cette mesure lors de la garde de nos jeunes, puisque par définition, la mesure de garde consiste à priver le jeune de sa liberté en le maintenant en hébergement. Il faut donc attendre la moitié de son ordonnance, lorsque celui-ci est éligible. Mais, là encore, cette condition n’est pas ultime puisque le retour progressif dans la communauté n’est pas systématique, mais dépend du cheminement du jeune. Finalement, puisqu’il est relativement difficile pour les intervenants de mettre ce processus en marche, les travaux bénévoles s’effectuent à la fin de l’ordonnance de garde du jeune, soit au dernier tiers de sa peine, où le jeune est dans la communauté, pour le soutenir dans l’application de sa mesure réparatrice. Rappelons en effet que les ordonnances de garde, sous la Loi sur les Jeunes Contrevenants, ne prévoyaient aucune surveillance au sein de la collectivité lorsque le jeune était remis en liberté. C’est pour parer à cette lacune que la LSJPA a intégré à la mise sous garde une période obligatoire de surveillance dans la Communauté, afin de proposer aux jeunes un soutien
adéquat, pendant la période de transition entre son placement sous garde et sa réintégration dans la collectivité.

2.2.2 Les « mesures réparatrices gérées à l’interne »

Cependant, dans les foyers et les centres d’hébergement, « la question du règlement des conflits, des multiples querelles, discordes et manquements réguliers aux règles de la vie commune se pose partout avec insistance. » (M. Vaillant, 1999) Ainsi, de plus en plus, des équipes mettent en pratique des démarches de réparation, au sein des institutions. « Il s’agit souvent de répondre aux problèmes disciplinaires les plus courants, en intégrant la proposition de réparation comme une sanction à visée médiatrice et restauratrice pour le jeune et pour le groupe. Il s’agit également d’intégrer la démarche réparatrice dans de nombreuses situations de crise ou de tension. » (M. Vaillant, 1999) Ainsi, plutôt que de punir les jeunes lors de situations conflictuelles, une réflexion suivie d'une mise en acte appropriée est souvent privilégiée pour « réparer » : lettre d’excuse, excuse verbale, actions quelconques, rachat etc. Ainsi, la réparation est toutefois au centre des objectifs et des outils éducatifs des unités de garde.

2.3 Comment développer des programmes?

2.3.1 Inspiration de différents modèles existants dans les prisons

Bien qu’il subsiste de grandes différences entre les prisons et les centres jeunesses, tant au niveau des objectifs, des lois qui les régissent, que de la population, il y a aussi des similarités non négligeables : absence de liberté, neutralisation, crimes graves, surveillance continuelle, objectif de réinsertion progressive dans la Communauté etc. C’est pourquoi il me semble intéressant, non de faire une comparaison en ce qui concerne la mise en place des mesures réparatrices entre les prisons et les centres jeunesses, mais de comprendre de quelle manière l’implantation parvient à se faire en prison malgré les difficultés rencontrées. En effet, nos recherches nous ont conduites à nous rendre compte que les processus de justice réparatrice étaient de plus en plus à l’œuvre dans les prisons, afin de permettre aux délinquants de mieux réintégrer la collectivité, à tel point que « there appears, at present, to be more restorative activity taking place in the adult prison system than in the juvenile secure estate.” (V. Knight et al.).

Au Canada plus particulièrement, le Service Correctionnel propose des services de médiation, animés par des professionnels, dans les pénitenciers. De plus, il est partenaire de la Direction de Justice réparatrice et du règlement des différents, où un grand nombre d’organismes à but non-lucratif « s’intéresse aux conséquences de l’acte criminel : blessures, traumatismes et torts subis par la victime », ainsi qu’aux « personnes concernées par un délit, victime et offenseur, et représentant de la communauté » (Centres de services de justice réparatrice, 2006). Ainsi, de nombreux services sont proposés aux parties, dont les Rencontres Détenus Victimes, « rencontres de groupe, en présence de personnes de la Communauté, entre détenus et victimes qui ne se connaissent pas, mais qui sont touchés par des délits semblables » (Centres de services de justice réparatrice, 2006). Ces rencontres se déroulent en plusieurs séances, avec une phase préparatoire, où les différentes parties sont rencontrées individuellement pour qu’ils puissent exprimer ses attentes et recevoir une présentation claire de la démarche et de ses conditions. La session elle-même, qui dure environ trois heures, où ils s’expriment mutuellement leurs motivations, attentes, souffrances, remords, pardons etc., avec l’aide, notamment, de supports ludiques. Elle est animée par deux intervenants, comporte deux à cinq personnes victimes d’actes criminels et des personnes détenues en nombre équivalent, tandis que des personnes de la communauté apportent discrètement leur support. Ces rencontres hebdomadaires se déroulent dans un local sécuritaire d'un pénitencier et dans un climat de respect, de confiance et d’écoute. (Centres de services de justice réparatrice, 2006).
Aux Etats-Unis, dans de nombreux états (Minnesota, Texas, Iowa, Ohio, Pennsylvanie etc.), des programmes appelés « Victim Offender Dialogue (VOD) » sont proposés dans certaines prisons, particulièrement pour les victimes de crimes violents et leur contrevenant. Le but premier est de « soigner » les victimes, désireuses de communiquer avec le contrevenant, et le second but est de faciliter le processus curatif des contrevenants violents. Ces rencontres permettent aux différentes parties de se rencontrer et de trouver un arrangement. C’est une occasion d’aider les deux parties, de compenser la victime et d’alléger le contrevenant. Bien entendu, un soin tout particulier est pris lors des rencontres préparatoires, pendant lesquelles les motivations, les enjeux, les objectifs sont abordés. (Just Alternatives Promising practices in justice and corrections, 2005)

A San Francisco, un programme appelé Resolve to Stop the Violence Project (RSVP), semble également apporté des résultats intéressants: des avocats de la défense, des anciennes victimes, des anciens membres de gang, des leaders religieux viennent rencontrer des détenus, six jours par semaine, et explorent avec eux les raisons du recours à la violence, en leur apprenant des solutions de rechange au comportement violent. Une fois par semaine, des victimes se présentent à l'unité pour exprimer aux contrevenants de quelles manières la violence a effectué leurs vies. De plus, par un lien visuel, les membres de la famille ou les victimes réelles peuvent parler des tords causés par le crime qu’elles ont vécues, cela fournissant l’occasion de contrevenant d'exprimer leurs remords. Des recherches ont démontrées que, tout au moins à court terme, la récidive avait nettement baissé pour les criminels qui avaient suivi ces programmes, et ce, proportionnellement aux nombres de semaines passées dans le programme RSVP. (Resolve to Stop the Violence Program, 2005)

A Hamburg, enfin, un programme a été mis en place en prison pour les grands criminels, qui ont de très longues ordonnances. Le programme « Focus on victims » (Hagemann and Robertz, 2000). Ce programme comporte huit modules, chacun de 8 heures. Le premier consiste à identifier des victimes, le second à réfléchir aux sentiments éprouvés par différents types de victimes, le troisième à sa propre victimisation et à son ressenti, puis, on y aborde les crimes, la responsabilité, les conséquences, les alternatives, et enfin, le dernier module consiste à évoquer le concept de médiation et de réconciliation, et de permettre, si les prisonniers le souhaitent, ainsi que les victimes, une rencontre de médiation.

2.3.2 Obstacles du développement des mesures réparatrices en milieu d’hébergement

“This may be due to the fact that some adult prisons have relatively stable populations and a local catchment area, making it easier to arrange meetings between victims and incarcerated offenders. Such conditions may also make it easier for the establishments’ managers to free resources for experimental and innovative projects.” (V. Knight et al.). En effet, de manière réaliste, il est très dur d’envisager une médiation dans les unités actuelles, pour les deux principaux problèmes posés : La mesure privative de liberté, notamment la mise sous garde est souvent si courte, que parfois, il est difficile d’engager le jeune dans une véritable démarche motivationnelle. Le second obstacle, évoqué par V. Knight concerne l’endroit de la rencontre. Aucune pièce n’est neutre et totalement libre pour favoriser ce genre de démarche. Pour des raisons d’équité entre les parties. Il est davantage recommandé par les professionnels rencontrés de cibler des pièces totalement inconnues, tant pour la victime que le délinquant : « Il est déjà difficile qu’au départ, les parties soient sur le même pied d’égalité ! » Il semble effectivement très néfaste pour la victime de se déplacer à l’unité qui correspond au lieu de vie du jeune. Mais étant donné que le jeune ne peut sortir et réaliser de déplacement, cela complexifie la mise en place de telles mesures.

Un autre gros problème concerne l’ordonnance du juge proprement dite. La peine de placement et de surveillance est prononcée et en court d’exécution. Or, celui-ci ne peut pas prononcer en même temps une demande de médiation, qui est, quant elle, une mesure « extrajudiciaire » ou alternative à la peine privative de liberté. De plus, puisque les jeunes ont principalement fait des voies de faits violents, ceux-ci ont la plupart du temps un interdit de contact avec leur victime. Ainsi, cette condition, même si elle sécurise la victime dan un premier temps, est un frein aux processus de médiation. Ainsi, comme elles sont donc énoncées jusqu’à présent, les ordonnances ne permettent donc pas qu’une mesure réparatrice directe se mette en place autour du jeune. Il faudrait finalement que le type d’ordonnance change, et permette de laisser une place formelle pour une autre mesure réparatrice!

Enfin, une dernière limite de la mise en place de tels programmes concerne l’objectif même des mesures réparatrices. En effet, selon les Organismes de Justices alternatives, « la réparation n'a de sens que si elle s'inscrit dans un processus visant à rétablir un équilibre personnel et social entre les torts causés et une action bénéfique pour le corps social dans son ensemble. » (ROJAQ, 2005) Depuis quelques années déjà, il semble que le sens de ces mesures s’est modifié au profit d'objectifs de rééducation. Aujourd'hui, certains ont recours à cette mesure uniquement même pour prévenir la récidive. Or, cet objectif est certes la finalité du système pénal, mais non celui de la justice réparatrice. « Viser cet objectif par la mesure de travaux communautaires ou la médiation à la victime nous conduit à utiliser la communauté et les victimes à des fins thérapeutiques. Nous estimons que ce n'est pas là leur rôle. » (ROJAQ, 2005) En effet, si cette tendance s’accrue, les victimes n’y trouveront plus leur place. « La place qu'occupent le contrevenant et la prévention de la récidive ne doit pas éclipser le fait que les besoins et les droits des victimes constituent une préoccupation importante qui devrait guider le choix d'une mesure. » (ROJAQ, 2005)

2.3.3 Réflexions encourageantes en cours

Il semblerait que la question de l’implantation de mesures réparatrices au sein même des unités de garde soit depuis peu une préoccupation d’actualité des Organismes de Justice Alternative. En effet, des recherches sont en cours, afin de parvenir à généraliser les mesures réparatrices aux peines de placement et de surveillance. Les organismes de justice alternative sont conscients de la nécessité de mettre en action certains programmes dans les unités de garde, tant pour les jeunes contrevenants que pour leurs victimes. Celles-ci, comme nous l’avons vu, sont injustement privées de ces programmes, alors qu’elles devraient finalement, en être les premières bénéficiaires, étant donné les préjudices importants qu’elles ont subit. Les jeunes, comme nous avons tenté de le mettre en évidence, devraient eux aussi être les premiers ciblés. Cependant, ceux-ci sont aussi conscient des certaines difficultés présentées ci-dessus. Aussi, pour éviter ces problèmes, et notamment la négligence de la victime, tout en maintenant un moyen privilégié pour faire en sorte que les adolescents assument la responsabilité de leurs délits, le ROJAQ a exposé des recommandations :
- « aux délégués à la jeunesse et aux juges de faire un usage nettement plus fréquent des mesures réparatrices, dans les cas où elles sont appropriées; en règle générale, toute mesure imposée à un jeune contrevenant devrait inclure au moins une dimension visant à lui faire prendre conscience de l'impact de l'infraction pour la victime;
- aux délégués à la jeunesse de faire la pratique de la conciliation et des mesures de réparation et de restitution en apportant une attention toute particulière à l'équité, tant du processus que de la décision, pour la victime et pour le contrevenant;
- aux directeurs provinciaux de voir à ce que, à partir des pratiques existantes, se fasse une réflexion sur la sélection des cas appropriés pour les diverses formes de mesures orientées vers les victimes ainsi que sur la pratique de la conciliation de façon à en dégager des guides pour l'intervention
- aux responsables de la formation collégiale et universitaire ainsi qu'aux responsables de la formation en cours d'emploi dans les centres de protection de l'enfance et de la jeunesse de mettre sur pied des cours de formation à la conciliation entre les contrevenants et les victimes
- au ministère de la Santé et des Services sociaux et au ministère de la Justice d'examiner la possibilité de mettre au point des programmes qui, misant sur d'autres mesures, comme les travaux communautaires, pourraient favoriser le développement de mesures se rapportant aux victimes. >> (ROJAQ, 2005).

Des recherches, en Grande Bretagne et en Ecosse sont également en cours. Dans le journal The Youth Justice juvénile Board for England and Wales, on déplore notamment qu’il n’y ait aucun cadre officiel pour encourager le développement de la justice réparatrice, dans les établissements de garde pour les jeunes contrevenants. C’est pourquoi, il propose notamment que, dans certains cas, il serait avantageux de permettre aux jeunes d’avoir des autorisations particulières de sorties, pour leur permettre de s'engager dans une médiation de victime-contrevenant, à l’extérieur. De plus, comme le ROJAQ, il dénonce la nécessité de formation des intervenants, qui n’ont que peu de connaissances sur la victimologie, et les enjeux de la justice réparatrice. La formation générale de conscience sur la justice fortifiante et les questions plus larges de victime pourraient en effet permettre que certaines des inquiétudes soulevées par les intervenants s’estompent et qu’enfin, les mesures de médiation pénètrent les portes des unités de garde des Centres Jeunesses, par les clés de la cohérence, de la connaissance et de la formalité.


CONCLUSION

Cette recherche semble montrer des perspectives de changement interressantes en ce qui concerne l’implantation des mesures de réparation au sein des milieux de garde. Il semble que les prisons parviennent à trouver des moyens pour parer aux différentes problématiques posées par les institutions et les conditions de détention. Les unités de garde pourraient vivement s’y inspirer, en utilisant des locaux neutres, au sein des bureaux administratifs, par exemple, où un intervenant se chargerait de conduire le jeune et de l’attendre, puisque, bien évidemment, ce ne pourrait être lui le médiateur, étant donné qu’une équité s’impose entre les deux parties.
Avancer concrètement signifierait finalement d'outiller davantage les intervenants , notamment en ce qui concerne les connaissances en victimologie en justice réparatrice et de lui donner un pouvoir de décision plus grand quant à l’engagement du jeune dans une telle démarche. Lui seul connaît suffisamment le jeune et son évolution, dans cette période de vie. La période de surveillance pourrait être lui aussi un moment favorable pour continuer le processus de responsabilisation et de réparation, et pour parvenir à une rencontre avec la victime. Il serait donc du devoir du juge d’intégrer systématiquement à l’ordonnance d’une mesure de mise sous garde, une mesure réparatrice, gérée en temps et en heure par l’intervenant et le délégué jeunesse, ce qui donnerait de la cohérence au mandat, tant de la LSJPA que des Centres Jeunesses.


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¤ QUEBEC ET AMERIQUE DU NORD: Les programmes probants auprès des jeunes délinquants persistants



I.Problématique

Depuis longtemps, le traitement des délinquants est une question sociale fondamentale : peut-on « guérir », « sauver l’âme » de nos criminels ? La majorité des sociétés, traditionnelles ou non, se sont penchée sur cette question, afin de rétablir un bien être social, une sécurité de tous ses membres… « Comment le bien pourrait-il triompher du mal ? »...
Au fur et à mesure que les sociétés « évoluaient » et que les sciences progressaient, se sont développées des théories, puis des théories sont enfantés des traitements. Par des recherches empiriques et théoriques, les traitements ont alors pu être mis l’épreuve, par des méthodes rigoureuses, qualitatives et quantitatives, qui n’ont cessés, jusqu’à ce jour, de s’améliorer.
Ainsi, aujourd’hui, nous pouvons tester, confirmer ou infirmer les pratiques, sans cesse grandissantes dans le domaine de la criminologie. La criminologie, qui est devenue une science, à part entière, dans certains pays, surtout en Amérique, mais aussi dans plusieurs endroits d’Europe. La France quant à elle, n’en est pas encore là : la criminologie est un axe de la psychologie, de la sociologie, du droit. Ayant terminé mes études de psychologie clinique en France, mais ayant toujours eu comme désir et objectif de travailler auprès de population criminelle juvénile, je suis ainsi partie, au Québec, afin de continuer mon parcours « initiatique » dans un continent où les traitements et les interventions auprès des délinquants montrent de plus en plus leur efficacité, démontrée par les chercheurs.


II. Les modèles de traitement…

Dans cette recherche, les modèles de traitements sont en très grande partie largement inspirés de l’approche cognitivo-comportementale, approche que j’ai tenu à étudier étant donné le consensus de la très grande majorité des chercheurs et des auteurs au sujet de son efficacité, en matière de délinquance juvénile (particulièrement la délinquance structurée).
Tous les programmes qui démontrent la meilleure efficacité sont ceux qui sont polyvalents et ne doivent pas avoir une seule technique d’intervention, mais plusieurs modalités différentes, en fonction du jeune. (HOLLIN, 1990, LEBLANC et al., 2002, DIANNE et COURNOYER, 2005)

Les programmes cognitivo-comportementaux, qui consistent à améliorer les habiletés dans la gestion de la colère, par la restructuration cognitive, l’acquisition d’habiletés et l’entraînement à l’application (à travers le réencadrement cognitif, l’entraînement à la relaxation, l’imagerie, le modelage et les jeux de rôle), s’avèrent efficace et diminuent significativement la colère, chez les jeunes contrevenants. (BECK and FERNANDEZ, 1998).
De plus, les ateliers incluant les problèmes de résolutions interpersonnelles, l’entraînement au contrôle de soi et à la gestion de soi, l’entraînement, la gestion de la colère, la prise de rôle, le développement du jugement moral sont également ceux qui semblent les plus satisfaisants. (HOLLIN, 1990).

Ainsi, le programme Reasoning and Rehabilitation (R and R) de Ross et Fabiano (1985) est vu comme l’un des meilleurs programme existant, puisqu’il comporte des éléments d’habiletés sociales, de résolution de problèmes interpersonnels, de modèles cognitifs, de prises de perspectives sociales, de raisonnement critique, de valeur, de méta-cognition, et de contrôle de soi. Le programme demande 80h d’entraînement intensif avec des groupes de 4 à 6 jeunes en probation, mais montre des résultats d’une efficacité extrême, après 9 mois, avec un taux de récidive de 18%, au lieu de 70% pour le groupe de probation et 48% pour celui dans un groupe d’habiletés de vie. (HOLLIN, 1990, LANDENBERGER and LIPSEY, 2005)

Cependant, le programme ART, à plusieurs modalités, qui utilise les techniques d’habiletés sociales et de thérapie cognitivo-comportementale de Glick and Goldstein (1987), est retenu comme montrant le plus d’efficacité. (HOLLIN, 1990, BARNOSKY, 2002, LANDENBERGER and LIPSEY, 2005) Il s’agit d’un programme cognitivo-comportemental, de 10 semaines avec 30 heures d’intervention administrées en groupe de 8 à 12 jeunes contrevenants, trois fois par semaine (soit 1 heure par atelier de groupe). Pour être éligible, le jeune contrevenant, doit avoir un risque de récidive modéré ou élevé, et avoir un problème d’agressivité ou un manque d’habiletés pro-sociales. En répétant les techniques apprises dans les ateliers, les jeunes doivent développer de nouvelles habiletés, de contrôle de la colère et utiliser des comportements appropriés.


III. Les cadres et contextes de prédilection…


Les programmes d’interventions auprès des jeunes contrevenants les plus sévères sont effectivement efficaces, de façon significative, quel que soit le type de jeunes. Plus ils sont secondés par des programmes spécifiques particuliers, plus l’efficacité est significative. La différence entre l’efficacité des traitements en milieu institutionnel et communautaire n’est pas significatif, mais toutefois un peu plus élevé dans la Communauté. (LIPSEY and WILSON, 1998). En contexte non institutionnel, le pourcentage d’efficacité des programmes sur la récidive est de 50%, par rapport à 30% pour le groupe contrôle, ce qui correspond à une réduction de la récidive de 40%, avec une meilleure efficacité d’abord pour des programmes de rencontres individuelles, d’habiletés interpersonnelles et des programmes comportementaux. En contexte institutionnel, le taux de diminution de la récidive est de 30 à 35%, ce qui reste, là encore, très élevé. Les programmes à prioriser qui fonctionnent le mieux sont les habiletés interpersonnelles, puis les techniques d’enseignement à la vie de famille, puis les programmes comportementaux.
Il apparaît effectivement que les programmes de probation, d’autant qu’ils soient intensifs soient bien efficaces avec ces types d’adolescents et plus efficace dans le temps (1 an après l’ordonnance) que les programmes en centre de garde, ou en probation régulière. Il faut qu’ils présentent de hauts risques d’activités délictuelles tout en ayant un niveau modéré de besoin. Enfin, l’intervention doit se focaliser sur les facteurs de risque. (DIANNE et COURNOYER, 2005)


IV. L’implication des membres de la famille…


Quelque soit le programme utilisé, une perspective d‘action multi systémique est recommandé: effectivement, il est nettement conseillé que les parents soient acteurs et impliqués dans l’apprentissages et l’entraînement des habiletés des jeunes. (DIANNE et COURNOYER, 2005) Une famille actrice et partenaire est essentielle dans le suivi et engendre une meilleure efficacité des programme, et donc, une diminution de la récidive plus significative. (GOLDSTEIN, 1989, DIANNE et COURNOYER, 2005)
Dans son étude extrêmement riche et complète, OLLENDICK (1996) évoque des programmes cognitivo-comportementaux de formation aux parents, consistant à développer des habiletés parentales. Selon un grand nombre de recherches, ces ateliers améliorent non seulement le comportement du jeune à la maison, mais dans la communauté. De plus, une attention particulière doit être mise sur la bonne relation parent-enfant.

V. Le continuum des services…


Pour une efficacité totale, lorsqu’il s’agit d’un suivi intensif dans la communauté, soit, les plus efficace auprès des jeunes délinquants persistants, aux programmes doivent être ajoutés plusieurs conditions, soit participer à des activités prosociales (loisirs, école, travail etc.) d’au moins 30 à 40h par semaine et avoir des couvre feu quotidien (DIANNE et COURNOYER, 2005).

VI. L’innovation…


BARNOSKY (2002) cherche à étudier l’efficacité d’une thérapie dialectique comportementale, mise en place à Washington, qui est un traitement cognitivo-comportemental compréhensif, spécialement conçue pour les individus pour qui il est difficile de traiter des dysfonctionnements mentaux. Originalement développé par M. Linehan, pour les individus suicidaires, ayant des difficultés à réguler leurs émotions, les programmes de DBT incluent l’entraînement et la consultation pour améliorer les habiletés des individus. Pour cela, les DBT ont un versant individuel, et un de groupe. D’abord, en petit groupe, tous les résidents vont dans des ateliers d’entraînement aux habiletés. L’emphase est mise sur l’aide à l’acquisition de nouvelles compétences, une à une, à travers les renforcements et la généralisation, jusqu’à ce que le jeune soit capable de les utiliser dans les interactions quotidiennes. Dans un second temps, le jeune est en thérapie individuelle, et l’intervenant travaille avec lui sur une analyse des comportements, une restructuration cognitive, un entraînement aux habiletés, etc. Puis, on enseigne aux partenaires (famille, assistants sociaux etc.) comment supporter et renforcer les nouvelles habiletés du jeune. Enfin, des réunions d’équipe sont organisées afin que les intervenants reçoivent une rétroaction pour s’assurer qu’ils adhèrent au cadre de la DBT.
Bien qu’il faille rester vigilent sur les résultats de cette étude, puisqu’elle n’est que préliminaire, il me semble que cette étude soit très pertinente et qu’elle puisse donner des pistes intéressantes, au sujet de la méthodologie pour mettre en place des programmes cognitivo-comportementaux en institution, plus particulièrement en ce qui concerne les quatre temps d’intervention.
Une seconde étude de BARNOSKY (2002), s’est intéressée à l’efficacité du programme ART, dans des institutions de jeunes contrevenants. Ce qui m’a semblé original et intéressant, c’est qu’en plus de l’application du programme ART, un groupe de discussion était mis en place, guidé par des animateurs, pour corriger les pensées anti-sociales des jeunes, et que cela semblait démontrer des résultats encourageants.

VII. Les conditions facilitant l’implantation…


La qualité de la mise en application doit être bonne puisqu’elle influe sur les résultats. (LEBLANC et al., 2002, LIPSEY, 2005) Pour cela, il faut être vigilent aux résistances de l’institution (maintient des punitions plus que de la réhabilitation, conflit de rôle entre gardien de prison et thérapeute, mise en place de l’intervention pour une bonne efficacité, les résistances du personnel et des chefs etc.), et les contrer par différents moyens : DIANNE et COURNOYER (2005), avancent qu’il faut avant tout des professionnels compétents toujours formés, qu’il est nécessaire de valoriser et prendre en compte les réflexions des intervenants dans la recherche « recherche action », puis faire des recherches évaluatives (élaboration et évaluation des programmes en cours d’implantation). C’est une fois la maturité du programme atteinte que les devis expérimentaux devraient se faire. Les résistances du client (pas de motivation à changer) contribuent aussi aux échecs des traitements, s’ils ne sont pas pris en compte sérieusement lors de l’implantation des programmes. (GOLDSTEIN, 1987, SHIVRATTAN, 1988, HOLLIN, 1990) En effet, malgré que la population ciblée soit non volontaire, il est nécessaire d’engager les jeunes dans une motivation et une ouverture au programme et de leur laisser le choix de ne pas participer. Pour cela, le modèle de GOLDSTEIN est conseillé par la plupart des études (HOLLIN, 1990, SHIVRATTAN, 1988, LANDENBERGER, and LIPSEY, 2005)

Ainsi, reprenons les grandes lignes de l’implantation du programme ART, qui a démontré son efficacité : Après le développement du programme d’étude ART, la phase préparatoire consistait dans l’entraînement rigoureux du personnel, puis la structuration du résident : c’est là que la motivation du jeune et sa mobilisation est sollicité par différents moyens pendant deux semaines précédant le début du programme, notamment par l’information, la campagne d’affiches, accrochées dans le hall, la salle a manger et n’importe où d’autre où était inscrit « Quelque chose de gros va commencer », « Joignez vous au gang des types de colères », des rencontres en groupe et individuelles sont également organisées pour présenter l’intérêt et les points forts du programme. A la fin des sessions, il est dit aux jeunes qu’ils iront ensemble manger une pizza, pour ceux qui auront complété leur devoir. (GOLSTEIN and GLICK, 1987).

L’étude de PULLEN (1996) est une très belle illustration de l’échec d’une bonne implantation d’un programme, R&R, dans différentes régions du Colorado, dans les services de probation intensive. Après un enregistrement vidéo des sessions d’apprentissage et des habiletés présentées par les intervenants aux jeunes contrevenants, revue ensuite par E. Fabiano, l’une des précurseurs du programme, les conclusions ont montré une amélioration au niveau de l’attitude, aucun résultat significatif au niveau de la récidive. Celle-ci a remarqué que les sessions n’étaient pas proposé de manière correcte, les informations cruciales n’étaient pas toujours communiquées, les concepts et les compétences demandés n’étant pas assimilés par les animateurs et mal expliqués, les combinaisons des sessions inappropriées, les leçons mal préparées, ce qui engendrait que les jeunes contrevenants ne comprenaient ni connaissances ni compétences, puisque le programme n’était finalement pas pertinent pour les jeunes. Le problème dénoncé par les animateurs est qu’ils n’avaient pas suffisamment de temps pour préparer les sessions. Les jeunes, quant à eux, n’étaient pas motivés et avançaient qu’ils étaient obligés de participer contre leur grès à ces ateliers.
Cette étude a pu démontrée que l’implantation du programme n’était que minimal, entre 1994 et 1995, au Colorado. Bien qu’il était indispensable de délivrer des périodes pour que les intervenants puissent être formés, le programme a manqué de support institutionnel. Effectivement, il y a eu un problème important au niveau de l’administration du programme, y compris le manque de formation des animateurs.
Ainsi, des recommandations ont été faites afin que les programmes puissent être facilités dans les structures, dont les plus pertinentes sont :
- Si l’état de département judiciaire projette de continuer à mandater la participation dans le programme, l’administration doit donner une priorité totale et mettre en œuvre les éléments suffisants pour le fonctionnement du programme et donc, redistribuer des ressources et mettre en place un dispositif de contrôle de l’application du programme.
- Les animateurs doivent être intéressé à présenter le programme, et ne peuvent être obligés. Des dispositifs doivent être mis en place afin de les intéresser.
- Augmenter le support administratif pour le programme, et chaque professionnel devrait être obligé à participer à participer à une réunion sur les principes, les exigences du programme pendant et pour la rééducation.
- Une session booster devrait être faite entre 30 et 45 jours après les ateliers.
- L’entraînement devrait être davantage favorisé
- Améliorer et diriger la mise en oeuvre et la qualité du programme
- Engager un coordinateur à temps plein pour la région, pour coordonner les sessions, examiner le programme et la forme d’évaluation, et d’être une ressource disponible aux animateurs, qui auront besoin de réponses concernant le programme
- Pendant la probation, il faudrait renforcer et encourager les parents à participer activement aux processus d’apprentissage de leurs jeunes.

VIII. L’efficacité…

Toutes les études le prouve : L’intervention auprès des délinquants en difficultés est efficace. Mais pour s’assurer d’une meilleure efficacité du traitement, trois facteurs sont pris en compte (LIPSEY, 1995) :

- La modalité et le type de traitement : Ce qui ressort des études, c’est le modèle psychoéducatif, avec l’approche cognitivo-comportementale et cognitivo-développementale, suivi dans un contexte judiciaire, et quand il est combiné à d’autres.
La forme d’adaptation différentielle semble effectivement la plus efficace, car aucun programme ne fonctionne avec tous les délinquants : les mesures et les méthodes doivent être adaptées aux types d’adolescents en difficulté : C’est au programme de s’adapter au client et non au client de s’adapter au programme. (HOLLIN, 1995) Pour cela, une approche différentielle doit intégrer la notion d’appariement entre l’intervention et le jeune. (LEBLANC et al., 2002, DIANNE et COURNOYER, 2005). Plus particulièrement, l’intervention auprès de jeunes en difficultés nécessiterait la présence de 4 éléments : l’intervenant, l’adolescent, la mesure et la méthode. Pour une efficacité optimale, c’est 4 éléments doivent être interreliés. (LEBLANC et al., 2002)
Ainsi, à l’unanimité des études les plus récentes, c’est le programme ART qui semble privilégié (LEBLANC et al., 2002, BARNOSKY , 2002, DIANNE et COURNOYER, 2005). En effet, celui-ci montre une corrélation plus élevée dans ses résultats, suivi du programme R&R. Lorsque tous les facteurs sont présents, dans les 12 mois qui suivent l’intervention, il y a 25% de chute de la récidive, ce qui correspond à 52% de moins que dans le groupe contrôle. (LANDENBERGER, and LIPSEY, 2005). Pour une implantation du programme dans la communauté, les parents et la famille sont sollicités pour participer au programme, et non simplement les jeunes. Cela durera 3 mois, où il y aura 2 rencontres par semaine, pour un total de 25 sessions, d’entre 1h 30 et 2h. Le premier temps est consacré à une discussion sur les différentes situations de vie vécues, puis, l’apprentissage et l’entraînement aux habiletés, sur une alternative basique, puis un entraînement au contrôle de la colère, ou de l’éducation morale (GOLDSTEIN, 1989)

- Le degré d’évolution des recherches dans l’application et l’implantation du traitement : Ceux-ci ont aussi bien évidemment un grand impact sur les changements du jeune, les recherches doivent donc être bien fondées et le programme bien implanté. (cf. voir le point précédant)

- Le « dosage » du traitement donné aux jeunes : Là encore, il doit s’adapter aux besoins du jeune, mais doit toutefois être intensif et d’un minimum de 26 semaines, soit de plus de six mois, et plus de cent heures de contact au total, trois rencontres par semaine avec un intervenant, rencontre familiale hebdomadaire, auto-observations quotidiennes, respect d’un contrat comportemental sur les distorsions cognitives. (DIANNE et COURNOYER, 2005) Selon les études de Lipsey (2005) Le programme en tant que tel devait être d’un minimum de 16 semaines, soit 4 mois. Les ateliers proposés doivent être contrôle de la colère (identifier les circonstances de la colère et trouver des moyens pour la contrôler) et résolution de problème interpersonnel (s’arrêter avant d’agir, prendre conscience de ses erreurs de pensée et modifier les pensées, trouver des solutions pro-sociales).

Suites à ses études, HOLLIN (1990) fait quelques recommandations qu’il me semble également intéressant de présenter ici : évaluer le jeune et ses besoins individuels pour maximiser les chances d’une analyse précise fonctionnelle ; avoir les critères claires pour l’intervention (motivation, volonté de s’ouvrir sur ses délits) ; faire une distinction claire entre les cibles criminologiques et cliniques ; être préparé à concevoir une étude de cas complexe en utilisant de multiples lignes de base pour travailler la cognition et le comportement ; faire attention aux questions relatives à l’intégrité du traitement (l’entraînement et la motivation du personnel et des familles influent sur le programme) ; construire des stratégies de généralisation à l’intérieur des programmes ; pour des intérêts professionnels et pour les futures générations de jeunes contrevenants, se préparer à entrer ces traitements dans les politiques et le social ; être préparé à contrer les mythes selon quoi rien ne fonctionne avec des méta-analyses etc.

IX. Les méta-analyses…

- BECK, R. and FERNANDEZ, E. (1998) réalisent une méta-analyse afin d’évaluer l’efficacité des programmes dans le traitement de la colère, en s’intéressant uniquement aux thérapies cognitivo-comportementales, qui sont celles qui ont déjà montré la supériorité de leur efficacité par rapport aux autres thérapies. En restant fidèle à la méthodologie qui apparaît dans les 50 recherches retenues et conduites sur 25 ans, de 1970 à 1995, ils présentent l’approche d’habiletés reproduites, dont l’intervention est en trois phases : la préparation cognitive, l’acquisition d’habiletés et l’entraînement à l’application.


-La méta-analyse d’OLLENDICK (1996), pose la question sivante : Qu’est-ce qui peut être fait au sujet de la violence des jeunes ? Il présente une recension des écrits extrêmement riche et variée, comportant des auteurs théoriques fondamentaux qui ont traités le sujet de la violence et de l’agressivité, ainsi que des chercheurs qui ont fait des études, non seulement en Amérique du Nord, mais également dans les pays européens, d’outre mer, d’Asie et d’Afrique, en ce qui concerne les facteurs, les effets de la violence et de la délinquance, ainsi que les traitements les plus efficaces.

- La méta-analyse de LANDENBERGER. et LIPSEY (2005), qui évalue les effets positifs des programmes cognitivo-comportementaux pour les contrevenants. Elle reprend d’autres méta-analyses, notamment de Pearson (2002), de Wilson et al (2005), de Lipsey (2001 et 2005), puis des recherches bibliographiques, datant de 1965 à 2005, des études sur Internet, dans les journaux spécialisés, les bibliographies, les moteurs de recherches.

- La méta-analyse de LIPSEY (1995) vise à voir l’efficacité des traitements cognitivo-comportementaux sur les jeunes contrevenants. Celle-ci s’inspire de 400 études auprès de jeunes contrevenants de 12 à 21 ans, publiés ou non, menées dans des pays anglophones, de 1950 à 1995, qui examinent le changement dans le niveau de délinquance de groupes de jeunes ayant eu un traitement (quel qu’il soit), en comparaison avec des groupes contrôles (non traités).

- La méta-analyse de HOLLIN (1990) reprenant, quant à elle, toutes les recherches sur l’intervention cognitivo-comportementale auprès de jeunes contrevenants, tant des programmes individuels (thérapie comportementale individuelle, programme d’entraînement aux habiletés sociales, programme cognitivo-comportemental, programme multimodal) que des programmes institutionnels (économie de jeton, les endroits d’accomplissement) ou en communauté (intervention en milieu scolaire, en milieu familial, et la probation), tente de dégager quelques éléments de succès et d’échec, concernant les connaissances qu’il existe de l’intervention cognitivo-comportementale.

- La méta-analyse de LIPSEY et WILSON (1998) traite de l’intervention efficace auprès de jeunes contrevenants. Ainsi, ils reprennent tous les résultats de 200 études expérimentales et quasi-expérimentales concernant l’efficacité des interventions auprès des jeunes contrevenants structurés, en y modifiant les résultats, ceux-ci n’étant pas assez précis, selon leur point de vue. En effet, aucune distinction n’avait été faites jusque là entre les différents types de criminels, particulièrement les plus sérieux, qui sont pourtant les plus résistants au traitement. Les caractéristiques des 200 études, publiées entre 1950 et 1995, sont très diversifiées, tant au niveau des sources, des pays de provenances, des disciplines des auteurs que des types, des âges, des origines ethniques, des programmes testés, ou encore que des méthodes et procédures.

X. Commentaire critique…

Les études que j’ai pris en compte ne sont peut-être pas les plus pertinentes, en terme de précision. Souhaitant évoquer le processus de généralisation des acquis auprès des jeunes contrevenants, en unité de garde, dans cette recherche, qui est un processus découlant de l’approche cognitivo-comportementale, je me suis rapidement confrontée à la réalité suivante : le sujet était trop précis, et il m’était impossible de recueillir le nombre d’études suffisantes, à moins d’ « extrapoler » largement le sujet. Ainsi, j’ai choisi d’être plus générale et d’ouvrir mon sujet aux programmes efficaces auprès des jeunes délinquants persistants, afin de pouvoir refermer petit à petit à des programmes, puis à des techniques à l’intérieur même des programmes.
C’est ainsi par « la méthode entonnoir » que j’ai procédé tout au long de cette recherche : Dans certaines études effectuées, la population étudiée s’ouvre au-delà même des jeunes contrevenants. Celle de LANDENBERGER et LIPSEY (2005) étudient les contrevenants en général. Mes premières lectures (méta-analyses) s’étant entendues sur les traitements avec une approche cognitivo-comportementale, voilà pourquoi j’ai délimité rapidement mon sujet à cette approche et que, dans cette optique, cette méta-analyse de 2005 était un grand apport pour moi : Ses données extrêmement récentes en terme de traitements efficaces auprès des contrevenants étaient très pertinents, si bien qu’il m’a semblé judicieux de la présenter en guise d’introduction.
Dans celle de BECK et FERNANDEZ (1998), la population concernée est plus vaste encore puisqu’elle a comme objet les traitements les plus efficaces pour faire diminuer la colère et ne s’intéresse pas uniquement aux jeunes contrevenants mais s’étend aux parents abusifs, aux écoliers avec des troubles du comportements et de personnalité, aux adultes et adolescents normatifs et aux détenus. Mon objectif, dans cette recherche, étant de parvenir à une idée assez claire d’un programme pour jeunes délinquants persistants, basé sur des idées probantes, cette méta-analyse évoquait les traitements de la colère, que nous voyions, au fur et à mesure, comme nécessaire à prendre en compte dans les programmes efficaces pour diminuer la récidive. Ainsi, cette méta-analyse, qui a également utilisé des études spécifiquement réalisée sur les adolescents persistants a pu nous apporter un modèle de programme de gestion de la colère plus précis, qui apportait les meilleurs résultats.
Cette recherche des programmes les plus efficaces auprès de jeunes délinquants persistants m’a mené aux programmes de Goldstein et de Ross et Fabiano. C’est pourquoi j’ai repris les études de GOLDSTEIN (1987 et 1988), de BARNOSKY (2002), de ROHDE (2004), de PULLEN (1996), bien plus précises en terme de programmes et de facteurs significatifs ou non.
Cependant, par cette démarche, il est possible que j’ai délaissé des études plus générales et plus pertinentes en terme de validité notamment méthodologique, au profit de ces dernières, dont certaines sont des recherches pilotes qui prédisent des résultats mais ne peuvent les avancer avec une certitude absolue, ce qui enlève de la valeur à ma recherche et donc, à mes conclusions.

XI. Commentaire méthodologique…

La plupart des études, notamment des méta-analyses retenues, ont une méthodologie très rigoureuse. Notamment, pour Lipsey et Wilson (1998), les études réalisées jusque là sont toutes trop générales, et proposent des interventions trop uniformes. Les caractéristiques associés à l’efficacité des programmes d’intervention étant très différentes, selon qu’on se situe en institution ou en communauté, ceux-ci se proposent de faire une recherche, qui divise les interventions les plus efficaces, en contexte institutionnel, ou en contexte communautaire. Reprenant tous les effets de taille afin d’être le plus fidèle possible dans la compilation des résultats, la méthodologie utilisée par Lipsey et Wilson est la plus rigoureuse, à ma connaissance, en ce qui concerne la précision des résultats.

Pourtant, certaines, particulièrement trois, doivent être prises avec plus de recul : les deux études de BARNOSKY (2002), ne présentent que des résultats préliminaires, ce qui enlève de la valeur aux conclusions de la recherche. Ces études, réalisées dans des établissements de Washington, entre 1998 à 1999, présentent des résultats sur la récidive, 12 mois après le programme, celles-ci devaient se prolonger sur une période de 18 mois après la période de suivi. Les résultats n’étaient donc pas encore communiqués à ce moment-ci de l’étude. De plus, la méthodologie n’est que très peu évoquée (ce qui ne permet pas de s’assurer de sa validité) et le cadre gouvernemental ayant comme second objectif de faire une étude de dépense (à savoir si de tels programmes sont avantageux sur le plan financier), il ne faut pas mettre de coté la possibilité que les résultats ne soient pas fiables, voire modifiés en fonction des conclusions budgétaires…


Mais il semble que ce soit l’étude de Rohde (2004) avec laquelle nous nous devons d’être vigilent : En effet, il ne s’agit là que d’une recherche pilote (réalisée entre 2001 et 2002, avec 76 adolescents de sexe masculin âgés de 12 à 25 ans, incarcérés dans un service correctionnel très sécuritaire), qui comporte des failles. La première grande limite concerne le fait que les résultats sont uniquement basés sur la parole (les réponses) des jeunes, ce qui est, en soit, subjectif. En plus de cela, les questions concernent principalement les cognitions et les pensées, ces deux choses étant majoritairement difficile d’accès pour cette population. Ainsi, il est difficile de s’assurer du crédit des réponses. Ainsi, l’efficacité de cette étude est loin d’être total, et nous donne simplement un léger aperçu concernant le type d’élément susceptible de travailler avec le jeune contrevenant, notamment dans les unités de garde.

XI. Conclusion: Consensus, débats et inconnus

Toutes les études s’entendent sur l’efficacité des traitements ognitivo-comportementaux, auprès des jeunes contrevenants persistants. Ils vont tous plus loin encore et reconnaissent qu’une seule méthode n’est pas préconisée avec tous les délinquants. (GOLDSTEIN, 1987, HOLLIN, 1990 LIPSEY, 1995). En effet, avec l’évolution des études, on reconnaît de plus en plus qu’il est nécessaire de prendre en compte les problématiques des jeunes (type de délinquance, type de personnalité) dans le traitement, afin de s’adapter au jeune, et non l’inverse.

En ce qui concerne les programmes cognitivo-comportementaux, il semble que plusieurs principes soient pris en considération par les auteurs, en tant que facteur qui améliore l’efficacité auprès des jeunes contrevenants persistants : Les programmes de gestion de la colère ainsi que des entraînements aux habiletés interpersonnelles sont ceux qui sont le plus souvent favorisés auprès de ces jeunes délinquants. Pour une bonne efficacité de ces apprentissages, un modèle de session est proposé, avec de nouvelles habiletés ou des alternatives sont proposés au jeune, suivi d’un jeu de rôle (modeling). Après cela, il semble aussi par un grand nombre de chercheurs qu’il soit important de les faire pratiquer lors de la semaine l’habileté proposée, un maximum de fois possible, et grâce à l’aide de travaux pratiques à réaliser. C’est cette répétition qui permettra aux jeunes d’apprendre les techniques apprises pendant les ateliers et à développer ainsi de nouvelles habiletés.
Cependant, les auteurs ne s’entendent pas exactement sur les caractéristiques des programmes : GOLDSTEIN (1987) décrit son programme comme en 25 sessions : 13 semaines, à un rythme de 2 par semaine d’1h 30 à 2h, pour un total de 40 à 50h. D’autres évoquent 30 sessions d’1h, pour un total de 30h (BARNOSKY, 2002). D’autre propose 16 sessions de 2h par atelier, pour un total de 32h. (ROHDE, 2004). D’autre encore de 32 sessions à un rythme de 2 ateliers par semaine, pour un total de 48h (LANDERBERGER et LIPSEY, 2005). On peut toutefois voir des différences qui ne sont pas réellement significatives.
Quoi qu’il en soit, quelques études ont aussi pu illustrer ce que la plupart des chercheurs évoquaient : une bonne implantation et intégrité du programme est essentielle pour que les effets attendus du programme puissent être observés.

La motivation du jeune est également est un facteur qui semble indispensable, dans les études où celle-ci est évoquée. Ainsi, il semble indispensable que le jeune soit motivé à participer au programme pour que les résultats concernant sa récidive soit efficace : un jeune en résistance n’acquerrera aucune compétence et ne mettra pas en application ses apprentissages. Pour cela, nous dégageons de ces études que les processus de renforcements sont ceux qui sont priorisés pour développer cet investissement chez le jeune.

L’implication des parents dans les acquis de leurs jeunes semble un facteur reconnu par tous. Cependant, là-dessus, des divergences existent au niveau de la technique à privilégier : Certains feraient participer directement les parents à des ateliers conçus spécifiquement pour eux, alors que d’autre les ferait participer aux ateliers des jeunes (GOLDSTEIN, 1987, LIPSEY, 1995). Enfin, pour d’autre, mettre les parents au courant en leur donnant quelques techniques pour supporter leur jeune est ce qui favorisé (BARNOSKY, 2002)
Ainsi, pour toutes ces considérations, le programme reconnu, quasiment à l’unanimité est le programme de ART de Goldstein, bien que certaines études mettent aussi en avant le programme R&R de Ross et Fabiano (1985) comme un programme qui démontre une efficacité presque semblable. Cependant, certaines recherches en ce qui concerne les effets significatifs n’ont pas pu démontrer l’efficacité du programme R&R, notamment à cause d’une défaillance au niveau de l’implantation, alors que les résultats du programme ART ont pu être reconnu à de multiples fois.

XII. Bibliographie :

- BARNOSKY, R. (2002). Preliminary findings for the juvenile rehabilitation Administration’s dialectic behavior therapy program. Olympia, Washington: The Evergreen State College, Washington State Institute for Public Policy.


- BARNOSKY, R. (2002). Washington State’s Implantation of Agression Replacement Training for Juvenile offenders: Preliminary findings. Olympia, Washington: The Evergreen State College, Washington State Institute for Public Policy.

- BECK, R. and FERNANDEZ, E. (1998). “Cognitive-Behavioral Therapy in the Treatment of Anger: A Meta-Analysis.” Cognitive Therapy and Research, 22, 1, 63-74.

- DIANNE, J. and COURNOYER, L.G. (2005). « Trajectoires délinquantes, la réadaptation est possible… à certaines conditions ». Prisme, 45, 206-217.

- GOLSTEIN, A.P. and GLICK, B. (1987). “Program description and evaluation”, in Agression Replacement Training: A comprehensive intervention for aggressive youth. Champaign, Illinois: Research.

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