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Murielle Fouassier témoigne de son expérience unique à travers ce blog: un voyage autour du monde, qu'elle a entrepris depuis janvier 2008, à la rencontre de milieux et de professionnels spécialisés en criminologie.

Suite à des études de psychologie, en France et de criminologie à Montréal, au Canada, Murielle a souhaité davantage élargir son champ de connaissance, afin de tenter de mettre en avant les pratiques d'interventions originales et efficaces en terme de diminution de la récidive, auprès des jeunes contrevenants, qui sont dans une période développementale complexe et déterminante.

Dans une ère où les interventions évoluent et progressent largement, où les moyens techniques nous permettent de dépasser nos propres horizons et de traverser les frontières, où tous les peuples se penchent sur des questions psycho-sociales déterminantes pour l'avenir de nos sociétés, "Criminologie de par le monde" symbolise le projet d'ouvrir et d'enrichir le regard porté sur l'intervention en criminologie. Il servira aussi à tous les professionnels exerçant de près ou de loin auprès d'une population de jeunes contrevenants, désirant ouvrir leur champ de connaissance ainsi que leur réseau.

Comment définir la criminologie en quelques mots? C'est une science sociale et humaine qui étudie les comportements criminels et tente non seulement d'expliquer le phénomène, en axant principalement son regard sur les causes et les impacts de la délinquance, mais aussi d'apporter des solutions, notamment en terme d'intervention.


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¤ L'INTERVENTION EN CRIMINOLOGIE

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10 sept. 2007

¤ QUEBEC: Compendium 2000 des programmes correctionnels efficaces, Motiuk



1. Références théoriques et empiriques…

Les programmes correctionnels sont qualifiés comme un « ensemble d’activités ayant un objectif précis», ou comme « une série planifiée de possibilités d’apprentissage présentés à des délinquants jugé, et, ayant pour objectif de réduire la récidive ». Il s’agit donc d’une perspective comportementale, dans une approche constructive.
Les références théoriques et empiriques sont différentes et multiples selon la structure du système de justice pénale, dans lequel on se situe, le nombre et la durée des rencontres etc. mais les activités sont souvent de nature psychoéducative, cognitivo-comportementale ou thérapeutique.
Leurs principes « tiennent comptent des particularités individuelles, dans le comportement criminel ». Ainsi est né une psychologie du comportement criminel, interdisciplinaire. Elle reconnaît un grand nombre de facteurs entrant en compte dans le comportement criminel, d’ordre biologique, personnel, interpersonnel et structurel, culturel, politique et économique. La perspective psychologique recommandée est une approche large de la personnalité et de l’apprentissage social qui repose sur un modèle fondé sur les causes de la criminalité et sur le changement personnel. On parle donc de facteurs de risques sur toutes les sphères de vie du jeune et les traitements ciblent les besoins criminogènes de la personne délinquante.
Pour Andrews et Bonta (1994), c’est avant tout l’approche cognitivo-comportementale, ou d’apprentissage sociale qui doit sous-tendre ces traitements, plutôt que d’autres formes de thérapies axées sur la compréhension de soi etc., en tentant d’agir directement sur la réduction des comportements et pensées antisociaux en utilisant des méthodes tel que le renforcement positif, tout en accordant une place privilégier aux notions de réceptivité (avec les étapes de Prochaska et DiClemente, de 1986), de motivation, de résistance et d’alliance thérapeutique.

2. Références légales, sociales ou politiques…

Ces programmes correctionnels ont été mis en place, durant les deux dernières décennies, dans un contexte socio-politique, où les pratiques et politiques correctionnelles de dissuasion, de sanction et de punition étaient prédominantes. Les politiciens et les décideurs voulaient satisfaire l’opinion politique, qu’ils disaient être en faveur d’une politique punitive. Ainsi, pour des raisons électorales, de plus en plus d’établissements carcéraux ont été construits. Les programmes correctionnels ont donc été discrédités. C’est l’évolution des examens quantitatifs qui ont permis de redonner du pouvoir aux programmes en prouvant l’efficacité des traitements, avec l’appuie des méta-analyses.
A présent que sont reconnues la légitimité et l’efficacité des programmes correctionnels, le théoricisme, l’ethnocentrisme, la destruction de la connaissance, le transfert d’expertise défaillant, et le manque de formation des intervenants sont encore de gros obstacles au dessus desquels il va falloir passer pour que soient véritablement mis en application les programmes.


3. Cadre et contexte de prédilection…

C’est la nature de la peine qui déterminera le genre de programmes utilisés. En effet, le cadre est vaste puisque le lieu d’exécution de ces derniers peut être la communauté, ou l’établissement. Le contexte de prédilection est lui aussi très large, puisque les programmes dépendent aussi des stades de prévention. Tolan, Guerra et Hammond (1994) en ont catégorisés trois :
La prévention primaire, qui est fondée sur deux approches, la prévention des situations, et la prévention par le développement. La première vise à limiter les occasions de commettre un crime, tandis que la seconde cible des populations fragiles dans le but de réduire les problèmes, à long terme, tel que la délinquance.
La prévention secondaire vise quant à elle des populations qui ont des risques déjà connus et problématiques, tel que la violence, les troubles de comportement, où les efforts déployés sont au niveau de la prévention de la délinquance juvénile.
Enfin, la prévention tertiaire s’adresse aux délinquants qui sont déjà reconnus coupables, dans l’objectif de réduire le taux de récidive.
Les types d’interventions, qualifiés dans cet ouvrage de programmes, sont présents dans les trois types de prévention. Le chapitre, quant à lui, se consacre uniquement aux programmes correctionnels donnés dans la prévention tertiaire, où les personnes sont donc contraintes de participer aux programmes, suite à des décisions judiciaires. En fonction du cadre d’intervention, et donc, indirectement, des risques criminogènes de la personne, les programmes pourront aller du plus intense (milieu carcéral, centre de garde etc., suivie intensif dans la communauté etc.) au plus léger, du plus court (quelques jours) au plus long (quelques années). Ils peuvent être précis et cibler un problème, ou bien cibler au contraire des objectifs très larges, mais dans tous les cas, ce sont les programmes multimodaux qui sont recommandés.

4. Modalité des interactions…


Un travail de partenariat est organisé autour de la personne délinquante, ou antisociale. Les enseignants, les travailleurs sociaux, les agents de probations, les éducateurs, les psychologues, les spécialistes (toxicologue, sexologue, psychiatre etc.), entre autre, sont les principaux acteurs. Ainsi, services correctionnels entretiennent des liens avec de nombreux autres organismes. Les interventions peuvent être employés séparément ou en conjonction.
Enfin, afin de maximiser l’impact des programmes correctionnels sur le délinquant, tout ceux qui gravitent autour de lui, soit la famille, l’école, les employeurs, etc. sont aussi impliqués dans les programmes.

5. Définition des objectifs poursuivis et de l’alliance thérapeutique…

Officiellement, le but social est d’assurer la sécurité de la collectivité, en contrôlant les individus ayant causés du tord à d’autres, tout en tenant compte de leurs besoins.
Le but des différents programmes est le même, soit, générer des changements chez les délinquants, à partir de choix personnels. Plus particulièrement, « faire en sorte qu’une personne ayant un comportement délinquant ou antisocial devienne plus respectueuse des lois ou adopte un comportement prosocial. Plus particulièrement, les programmes correctionnels visent à réduire les facteurs de risques et à renforcer les facteurs de protection : concrètement, les changements visés sont d’ordre comportementaux, cognitifs, psycho-affectifs, sociaux. Les deux premiers sont les plus souvent retenus dans les programmes, état donnés qu’ils sont plus facilement visibles.
Pour cela, l’alliance thérapeutique est vue comme particulièrement importante dans le processus de changement de la personne criminelle, d’autant que la grande majorité de la population concernée sont dans la résistance au changement. Cette alliance contribue à sa réceptivité au traitement, directement en lien avec la réduction de la récidive. L’un des défis serait de parvenir à aider la personne à passer de l’étape de précontemplation à la contemplation, puis à la détermination, à l’action et enfin au maintien.


6. Grille d’analyse/explication des problèmes cibles…

Les « clients », tel qu’ils sont nommés dans le texte de Motiuk, qui ont des comportements criminels ont la plupart du temps des problèmes de personnalité (hostilité, opposition, contrôle, domination etc.), de comportement (manque d’habiletés, incapacité à reconnaître sa responsabilité, colère, agressivité, violence et.), environnementaux (milieu socio-économique précaire, absence de bon réseau social etc.) et peuvent aussi présentés des traits de troubles mentaux (personnalité limite, antisociale, narcissique, psychopathique etc.). Ces facteurs, contribuant à la résistance, font de ces individus des clients qui ne présentent pas une bonne réceptivité au traitement, pour la majorité.

7. Stratégies d’intervention et processus de changement…
→ Matériel ciblé et travaillé durant l’intervention
Dans l’intervention auprès de personnalité criminelle, trois plans sont retenus : l’éducation, afin d’aider les personnes à acquérir des connaissances, la formation, afin de donner des outils pour permettre de développer des techniques manuelles ou cognitives, la thérapie, afin de remédier à des troubles émotifs et traiter les symptômes d’inadaptation. Cela peut être comparable aux procédés de guérison. La combinaison des trois procédés doit permettre de dégager de nouveaux modes de fonctionnement (de raisonnement et de résolutions de problèmes).
L’intervention doit ciblé tous les facteurs qui entrent en compte dans le comportement criminel et une attention toute particulière est accordée aux huit facteurs de risques suivant : les attitudes/ valeurs/ croyances, le soutien interpersonnel et social, les éléments fondamentaux de la personnalité, les antécédents de comportement antisocial, les circonstances difficile au foyer, à l’école et/ou au travail, dans les loisirs, et enfin la toxicomanie. Les besoins criminogènes des personnes sont ainsi ciblés par des outils d’évaluation/d’inventaire des risques et besoins criminogènes et l’intervenant tentera de les réduire, afin de diminuer la récidive.
Puis, les cibles favorisées sont l’évolution de la cognition ainsi que des états émotifs cognitifs antisociaux, la réduction des relations avec les pairs antisociaux, et l’augmentation des connaissances prosociales, le renforcement de la maîtrise de soi, du contrôle de soi et des compétences en résolution de problèmes.
L’intervenant doit aussi avoir une attention particulière à la réceptivité au traitement du client, afin d’accès ses stratégies, qui est un critère de réduction de la récidive important. Les facteurs de réceptivité comprennent la personnalité, la capacité, la motivation, les points forts, l’âge, le sexe, l’origine ethnique, la langue etc. Ainsi, tous ces éléments sont à prendre en compte durant l’intervention.
Pour toutes ces notions, ce sont les comportements et les cognitions de la personne qui sont ciblés, puisque ce sont ceux-là qui sont observables et mesurables. Il tentera de lui apprendre à acquérir des comportements plus prosociaux et adaptés.

→ Attitudes encouragées chez l’intervenant
Les programmes proposent des activités structurantes, accès sur la résolution de problèmes, l’utilisation de l’autorité, le renforcement des modèles anticriminels et l’acquisition d’aptitudes, favorisée par la mise en pratique des comportements et attitudes prosociales, en utilisant notamment des techniques de renforcement, le contexte de jeux de rôle, d’approximations progressives, d’extinction et de restructuration cognitive.
Mais afin de faire en sorte qu’un bon lien thérapeutique se mette en place, afin que la personne adhère plus facilement au processus de changement, et soit réceptive, l’intervenant doit avoir de bonnes qualités interpersonnelles, ouvertes, chaleureuses, dépourvues d’hostilité et de blâme, et engageantes. Il doit aussi être sincère, empathique, compétent, capable de motiver le client, avoir une bonne capacité de communication, être ouvert, enthousiaste, souple, attentif, respectueux, bienveillant.
Il doit cependant définir à la personne son rôle de professionnel ainsi que les limites de sa relation avec le client, et les maintenir tout au long du traitement.


→ Interventions et rétroactions verbales de l’intervenant
Les interventions varient en fonction du type de délinquants. Cependant, selon un bon nombre de chercheurs, il serait gagnant de commencer le programme par des entrevues motivationnelles (Miller et Rollnick, 1991). Cela reviendrait donc à aider les clients à faire une analyse des coûts-bénéfices du mode de vie délinquant. Il faudra aussi pouvoir créer des choix de motivations efficaces. Cette attitude non confrontante favoriserait l’établissement d’une bonne alliance thérapeutique. Il ne faut donc pas blâmer le « client », ni les étiqueter. Il ne doit pas non plus être trop moralisateur, trop critique.

8. Indications/Contre indications…

Ces programmes sont indiqués pour toutes les personnes ayant des comportements criminels : Tant les adolescents que les adultes délinquants sont visés. Hommes ou femmes, violents, intoxiqués, psychopathes, détenus, agresseurs sexuels etc.
Il est indiqué que les personnes à risques élevés aient les services les plus intensifs et que ceux qui ont des risques plus faibles aient peu ou pas de service. Le risque alors serait d’accroître les risques au lieu de les diminuer, par des facteurs tel que l’influence des pairs etc.

9. Résultats et efficacité…

Depuis quelques années, de nombreuses études portant sur les programmes correctionnels ont été répertoriées. Toutes les études (Lipsey, en 1992, Moncher et Prinz, Hollin, Andrews et Bonta, en 1998, Cullen et Gendreau en 2000 etc.) ont démontrés l’efficacité des programmes, en testant ceux qui étaient efficaces pour réduire la récidive et ceux qui ne l’étaient pas. Ainsi, tous, intervenants comme chercheurs, reconnaissent la nécessité et la validité de ces programmes.
Des études démontrent aussi que l’effet des programmes augmente avec le respect des principes des services à la personne, du risque, des besoins et de la réceptivité générale. En effet, à présent, les services correctionnels du Canada, comme dans plusieurs pays, cherchent à établir des méthodes afin d’assurer une bonne application de l’intervention. Selon Trotter(1999), il est essentiel que le travail social applique le modèle le plus fidèlement possible aux principes énoncés afin que les résultats soient significatifs. Des résultats montrent que tant les facteurs de réceptivité internes qu’externes sont à prendre en considération, afin de réduire la récidive.

10. Conclusions sur « les ingrédients actifs »…

- Mise en application optimale des programmes :
La sélection, la formation et la surveillance clinique des travailleurs face aux programmes (théories, outils etc.) est favorisée, ainsi que la mise à disposition de manuels sur le programme. Ce sont des ingrédients qui permettent une meilleure intégration des programmes et donc une meilleure intervention.
La motivation, le soutien de la direction, la compétence du personnel, un rapport des coûts-bénéfices, des objectifs et des méthodes claires, une structure hiérarchique bien définie sont des critères de réussite, pour une bonne mise en application des programmes correctionnels dans les services. De plus, l’intervention de chercheurs dans la conception ou la prestation des services accroît l’intégrité des programmes, afin de bien connaître les études consacrées aux pratiques, ainsi que les effets réels du programme.

- Les caractéristiques des programmes :
Le programme, quant à lui, doit être cohérent, et ses objectifs doivent être SMART, c’est dire simples, mesurables, atteignables, réalistes et dans le temps. De plus, le contenu des programmes doit être vu comme faisant partie d’un tout interactif, dynamique et évolutif.
Il est préférable que les programmes soient donnés dans la communauté, lorsque les facteurs de risques sont peu élevés. S’ils sont donnés en unité résidentielle ou en établissement, il est bénéfique d’axer les services sur la communauté.

- Les caractéristiques de l’intervention :

L’intervenant doit travailler dans le sens de la résistance : cela permettra de la réduire, le client devra participer activement à l’élaboration de son plan d’intervention, pour être preneur.
Pendant le traitement, les renforcements doivent être présentés quatre fois plus que les punitions.



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