* Présentation de M. GUEDAH:
M. GUEDAH est professeur et directeur du département de Pyschologie de l'université Mohamed V, à Rabat, capitale du Maroc. Il s'interresse à la problématique délinquante au Maroc, particulièrement celle des adolescents.
De plus, il fait parti de l'Association Internationale des Criminologues de Langue Française(AICLF) et organise, avec d'autres professionnels et chercheurs, le XI ème colloque ayant pour thème: "Délinquance et changements sociaux: Dialogue Nord Sud".
Ce colloque aura pour objectif de rassembler les préoccupations sociales et culturelles, les connaissances théoriques et empiriques et les pratiques/interventions actuelles des pays du nord et du sud afin d'avancer, ensemble, sur la problématique du phénomène de la délinquance.
* Etat de la délinquance au Maroc:
Les facteurs de délinquance, au Maroc, ne sont actuellement pas encore complètement établis. Ceux-ci dépendent d'une "interaction de facteurs sociaux et personnels dans un contexte culturel donné". Selon M.G., il est donc très délicat, voire impossible de mesurer avec exactitude les chiffres réels. Il semblerait, cependant, que certains facteurs criminogènes directs soient communs aux pays du Nord et au Maroc, notamment la famille (le contrôle parental et le le milieu socio-culturel) et l'école (l'absentéisme et le niveau scolaire).
Une variation cependant : Le système socolaire marocain est plus problématique que dans nos pays du Nord, et ne favorise pas l'intégration. Celui-ci, divisé en deux, public et privé, est particulièrement inégal. L'école privée, très chère, est donc composé de l'élite et mène facilement jusqu'à l'université. L'école publique, quant à elle, est très précaire. Bien qu'officiellement, les jeunes soient obligés d'être scolarisé jusqu'à 16 ans, la majorité quitte le système bien plus tôt: Manque de transport dans les villages; nécessité pour la famille que le jeune travaille (agriculture, pêche, élevage...); manque de qualification des professeurs; manque de place dans les écoles (dans de nombreux endroits du Maroc, le jeune ne va à l'école qu'à mi-temps); inadaptation des cours au marché de l'emploi...
Concernant l'évolution de la délinquance, des statistiques officielles sont établies au sein de la police et des tribuneaux, mais la délinquance auto-révélée par les jeunes présente un chiffre nettement supérieur. Il est donc difficile de situer l'évolution réelle de la délinquance.
Le type de délit est plus mesurable : le plus courant est le vol. Effectivement, en règle général, "les activités délictuelles sont très liées à l'argent." Vol à la tire, vol à l'étalage depuis peu et hold-up sont les principaux évoqués. Ceux-ci, réalisés en bande, ne sont pas reliés aux phénomène de gang de rue, qui est un phénomène très précis et dont la définition a été, à présent, établie.
* Réponses sociales à la délinquance:
L'un des problèmes aussi pour mesurer la délinquance, pour M. G., semble lié à l'activité policière. Bien que nous ne pouvons nier que cette réalité est également présente dans nos pays du nord, l'arrestation policière resterait très arbitraire. Les pratiques policières sont étroitement liées aux policiers et particulièrement aux rapports entre jeunes et autorité. La tendance reste encore liée au "bakchich" que demandent les policiers, en échange de leur silence. M.G. parle ainsi d' "affaires réglées souvent et malheureusement à l'amiable". De cela, nous pouvons donc supposer un lien direct entre la dénonciation des délits commis et le revenu économique du jeune ou de sa famille.
La procédure classique diffère des procédures des pays du Nord: Suite à l'arrestation de la gendarnerie royale, le jeune est présumé coupable. Une décision est alors prise, largement éclairée par l'enquète des travailleurs sociaux, concernant le type de mesure approprié. Il s'agit le plus souvent de placement en centre d'observation, de rééducation ou social, de protection de l'enfance pour jeunes délinquants. Les garçons et les filles sont systématiquement dans des structures distinctes. Des éducateurs, formés minimalement deux ans à l'université, sont chargés de leur réinsertion sociale. Etant donné le type de délit, l'objectif principal est de permettre aux jeunes de faire un apprentissage, dans la menuiserie ou la maçonnerie plus particulièrement, afin de sortir de l'institution avec un métier.
Sans que les chiffres aient pu être donnés, une grande majorité des jeunes ne récidivent pas.